mercredi 31 janvier 2018

La Maison de poupée de M.J.ARLIDGE

LIVRE

C'est le troisième roman policier de cet auteur anglais,mais une première pour moi.
Je n'ai pas été déçue et compte bien lire les deux précédents.
Une jeune fille se retrouve enfermée dans une cave,sans savoir comment.Son geôlier se présente assez vite.Entre temps,on découvre le corps d'une jeune fille sur la plage et très vite,les enquêteurs de Southampton songent à un tueur en série.
Il s'agit de relier entre elles,des disparitions de jeunes filles non élucidées en interrogeant les proches,de tracer un Smartphone qui à heures fixes envoie des textos,de cerner aussi le mode de vie et la psychologie des victimes potentielles. 
Rythme soutenu,dévoilement progressif des infos... et surtout une fine description des tentatives d'évasion de la jeune séquestrée.
Bref,... UN TRÈS BON THRILLER PSYCHOLOGIQUE. 

Un extrait du début:

"A ce stade de sa séquestration, elle avait examiné le moindre centimètre carré de sa prison. Les activités manquaient pour s'occuper durant les longues heures de solitude et elle avait fouillé l'endroit de fond en comble en quête d'un objet qui pourrait lui servir d'arme au besoin. Elle avait beau vouloir le nier, elle avait vu avec quelle émotion intense il la dévorait des yeux, elle avait senti son regard affamé glisser sur son corps. S'il tentait de la violer, comment se défendrait-elle ?"

dimanche 21 janvier 2018

LAIDLAW de William McILVANNEY

LIVRE

Lors de son passage à la Grande Librairie en octobre 2017,Pierre Lemaitre évoquait "Laidlaw" comme un des meilleurs polars qu'il ait lus.
On comprend cet avis et on y souscrit.
Ce polar paru en 1977 et un peu tombé dans l'oubli,vient d'être réédité dans la collection RIVAGES/NOIR.
L'intrigue policière n'a sans doute rien de très original.Une jeune fille a été assassinée et très vite,on apprend que le meurtrier se cache,recevant l'aide d'un ami.Tous deux sont homosexuels,ce qui pose la question du mobile.
L'intérêt de la lecture réside dans l'ambiance de cette ville de Glasgow,dans l'environnement social des protagonistes.On suit l'inspecteur Laidlaw,assisté du jeune Harkness dans les rues sombres,les pubs,les cuisines où se terrent le désarroi,le non-sens de vies en déshérence.
A eux de percer les secrets,d'entendre les non-dits.
Il y a par-ci par-là des trésors d'analyse psychologique.
La facture poétique de l'oeuvre est surtout remarquable.Les phrases sont travaillées au cordeau,soutenues par de belles images,parfois paradoxales,toujours soignées.
Un tel niveau d'écriture est suffisamment rare dans un roman policier pour être souligné.
En voici quelques exemples:
D'abord le constat du naufrage du mariage de LAIDLAW,flic dépressif mais opiniâtre:
 
"Maintenant les monstres étaient moins exotiques et, en même temps, plus difficiles à éviter. 
Il buvait trop, pas pour le plaisir, simplement il sirotait systématiquement comme on absorbe un poison lent. Son mariage ressemblait à un labyrinthe dont personne n'avait jamais dessiné le plan, une infinité d'habitudes, de blessures, de trahisons, autant de chemins sur lesquels Ena et lui-même avaient erré séparément, se rencontrant occasionnellement via les enfants. Il était policier , inspecteur de police et de plus en plus, il se demandait comment c'était arrivé.
Et il avait presque quarante ans."p13.


"Une nouvelle fois, il ressentit sa nature comme un paradoxe à la dérive.

Il était un homme violent en puissance et avait horreur de la violence, quelqu'un qui croyait à la fidélité et était infidèle, un homme d'action qui souhaitait la paix. Il fut tenté d'ouvrir le tiroir de son bureau où il gardait Kierkegaard, Camus et Unamuno comme on cache de l'alcool. Au lieu de cela, il soupira bruyamment et mit de l'ordre dans les papiers sur son bureau. Il ne pouvait rien faire d'autre qu'habiter les paradoxes."p14.

"Il (Harkness) en conclut que c'était l'effet Laidlaw. Une journée avec lui suffisait pour bouleverser toutes vos idées préconçues et vous rendre étranger à vous-même. C'est qu'il était compliqué, le gaillard, et si vous essayiez de vous adapter à ses complications, vous redécouvriez les vôtres."

Lors d'un interrogatoire des parents:
"...Leurs regards se croisèrent.Laidlaw et Harkness restèrent silencieux.
Ce n'était pas le moment de se mettre en travers.Ce regard,c'était vingt ans de mariage et ce qu'il contenait était bien plus compliqué que toutes les combines des services secrets.
Il n'était pas question d'une fille morte ni de la police.Il était question d'autres morts.
Il s'agissait de tout ce qu'une femme n'avait pu retirer d'une relation,et de la dignité qu'elle avait préservée en dépit de cela,il s'agissait de ce qu'un homme avait caché des promesses dont il ignorait probablement comment il avait pu les faire.
Il s'agissait d'orgueil préservé et d'orgueil perdu."p163. 


 

samedi 20 janvier 2018

THREE BILLBOARDS Outside Ebbing,Missouri de Martin Mc Donagh


FILM

Mais qu'est-ce qu'ils jouent bien ces acteurs (et actrices) américains!!!


Film intense qui au-delà de son étiquette de polar interroge au plus près les rapports humains.Le meurtre d'une jeune fille suite à son viol reste impuni.Pas de coupable après des mois...Situation intenable pour la mère qui va agir,...réagir à sa manière...
Affrontements avec le shérif et ses minables acolytes.Différents drames se croisent et les tensions se multiplient.On est totalement pris par cette histoire où L'HUMAIN tient la vedette.
Dirigés par un réalisateur anglais,tous les acteurs américains sont étonnants de justesse.
Mention particulière pour l'adjoint du shérif,Sam Rockwell qui jouait le rôle du détenu violent dans "La ligne verte" et bien sûr Frances McDormand,l'impayable flic enceinte du fil
m FARGO.Son jeu était un épique mélange de toupet et de naïveté...
De belles répliques cinglantes aussi.
Bref,UN RÉGAL
...



Frances McDormand                   

                    
 Sam Rockwell            



mardi 9 janvier 2018

L'échange des princesses de Marc DUGAIN

FILM***

Marc Dugain,lors de son passage à ONPC, évoquait l'importance des enfants,la place de ses enfants et petits-enfants dans sa vie.On le vérifie en découvrant le film.
Film en costumes,film surtout qui fait la part belle aux enfants,puisque les 2 personnages principaux de cet épisode,Louis XV et l'infante d'Espagne ont respectivement 11 et 4 ans.
On ne peut résister à leur charme,à ce ton juste que seuls les enfants offrent.
Leur jeu si naturel,si spontané fait merveille.Les adultes aussi ont été intelligemment choisis pour tenir le film en équilibre.
C'est Philippe d'Orléans (joué par Olivier Gourmet),régent du royaume de France qui a cette idée de génie:un double mariage pour renforcer les liens entre la France et l'Espagne et enterrer la guerre de succession.On "échange" donc les princesses.
L'infante d'Espagne,4 ans, rejoint la Cour à Versailles,pendant que Mademoiselle de Montpensier ,12 ans descend vers l'Espagne afin d'épouser le jeune héritier du trône.
L'ÉCHANGE a lieu à la frontière des deux royaumes sur la Bidassoa,fleuve du pays basque.

Marc Dugain a réussi un film soigné,esthétiquement parfait.Chaque plan ressemble à un tableau pensé,organisé dans le moindre détail.
Le message aussi est limpide:nous présenter les enfants royaux comme des marionnettes manipulées par les adultes à des fins politiques,sans aucun souci de leur personne. 
C'est montré avec délicatesse et tendresse.

Deux photos illustrent la réussite esthétique.
                          


 

lundi 8 janvier 2018

LA SORCIÈRE de Camilla Läckberg

LIVRE

Quand Läckberg fait du Läckberg.... et qu'elle le fait bien...
La romancière parvient à fidéliser son public en proposant une fois encore une histoire où s'imbriquent passé et présent,enquête ardue et problèmes familiaux,victimes innocentes et suspects multiples...avec en plus la thématique de l'accueil des réfugiés,pas toujours aisé en Suède.
L'enquête est dirigée par Patrick Hedström et sa femme Erica qui prépare un livre sur les faits lui apporte une contribution appréciable.
On retrouve cet équilibre entre interrogatoires,faits nouveaux et réunions de l'équipe d'enquêteurs toujours sur le grill.Ça se lit avec plaisir,sans pour autant "renverser la table"...

lundi 1 janvier 2018

ÉPÉPÉ de Ferenc Karinthy

LIVRE

Attention CHEF-D'OEUVRE*** 

Le personnage principal,Budaï,linguiste de formation pensait atterrir à Helsinki et voilà qu'il se retrouve dans une ville inconnue,immense,grouillante de monde. Il ne reconnaît rien,ne comprend rien et surtout...personne ne le comprend...commence alors une sorte de parcours du combattant. 
D'où viendra le salut? de son hôtel,d'une gare,d'une église,d'un zoo,d'un marché? De quelle rencontre? de la dame de l'ascenseur,du portier,d'une prostituée,voire d'un policier? De lui-même peut-être?
En tout cas,Budaï cherche,se débat,s'acharne,ne se résigne jamais et son acharnement,sa persévérance forcent le respect. L'identification joue à fond:que ferions-nous à sa place?Quelle issue,quelle solution imaginerions-nous? 
Ce roman est incroyable,pétri d'imagination. Il nous tient en haleine,car nous voulons savoir s'il s'en sortira,s'il trouvera un train,avion,bateau...n'importe quel moyen de regagner son chez soi,les siens,sa femme qui forcément sans nouvelles de lui s'interrogent. 
Le roman paru en 1970 reste si actuel,métatemporel.De tout temps et partout,les codes du langage se sont révélés indispensables pour communiquer,comprendre et être compris.
Les deux manquent cruellement à Budaï que la déshumanisation guette.

Extraits:
"...Il achète tous les marrons...Il paye avec un billet de petite taille,la marchande lui rend un peu de monnaie.Il les avale aussitôt,en marchant,goulûment,se brûlant les lèvres et pendant qu'il mange,une poussée de tendresse le prend,il a tant pitié de lui-même,pauvre homme perdu dans cette ville étrange."p20.

"C'est en lui-même que doit résider la faute,dans son caractère auquel toute agressivité,toute bousculade sont étrangères,cette révélation vient de s'imposer à lui,tout endormi et ivre qu'il est.
Tant qu'il n'arrivera pas à vaincre sa modestie pusillanime,sa crainte d'importuner,il n'arrivera jamais à partir d'ici,ni même à donner de ses nouvelles afin que quelqu'un puisse lui porter secours.
Il doit livrer combat lui-même,il n'y a pas d'autre issue.Il doit se transformer des pieds à la tête,c'est l'unique façon de recouvrer son ancienne,sa véritable vie,sa personnalité."p77.