lundi 16 août 2010

Cosa voglio di più? de Silvio Soldini.


FILM
Silvio Soldini, réalisateur italien a l'art de choisir les acteurs appropriés.
Déjà, sa comédie romantique " Pane e tulipani " nous avait régalés en 2000 et l'acteur Bruno Ganz notamment faisait merveille.
Cette fois, Soldini filme la naissance d'une passion entre deux êtres "ordinaires" (chacun marié) qui n'ont jamais éprouvé une telle intensité dans la découverte de leurs corps et de leur désir. Passion dévorante, torride. Attirance irrépressible qui balaie toute culpabilité, tout bon sens...Il ne reste que cette nécessité absolue de se revoir, de s'étreindre une fois encore .
Les 2 acteurs jouent juste, naturel ( l'actrice italienne Alba Rohrwacher est radieuse...),le rythme du film est alerte. De plus, l'environnement professionnel et familial des 2 amants, très bien défini donne de l'épaisseur et de la vraisemblance à leur relation.Je vous conseille donc ce film, sans bien sûr en dévoiler la fin!!!

lundi 9 août 2010


THE LAST STATION de Michael Hoffman.

FILM
Le film se consacre aux derniers mois de la vie de Tolstoi. Sa vie conjugale mouvementée correspond à une évolution de sa pensée : il éprouve alors une volonté de partage, d’amour universel. Le don de soi et de son œuvre au peuple russe est maintenant prioritaire . Sa femme
Se sent dès lors délaissée, trahie, spoliée de l’héritage. Les disputes, crises de larmes, réconciliations et menaces se succèdent. Typiquement russe ?
Tolstoi finira par quitter sa maison pour mourir dans le silence et la solitude laissant derrière lui 48 ans de vie partagée…Autour de ce couple attachant, gravitent quelques disciples en adoration devant le « Maître ».
L’histoire est agréable à suivre , malheureusement, Helen Mirren dans le rôle de l’épouse délaissée transformée en mégère en fait une tonne et ses simagrées frisent le ridicule.
Par ailleurs, le film donne peu de place à la pensée de Tolstoi, quelque part prémonitoire de la révolution proche. Les problèmes de la propriété privée , les privilèges des riches , la pauvreté des Moujiks , l’épanouissement de tous dans le respect de chacun lié au principe de la non-violence ( qui influencera fortement Gandhi ) ne sont qu’effleurés.
Mais sans doute était-ce l’intention du réalisateur de se limiter au cadre strictement privé de la fin de la vie de Tolstoi.
HYPOTHERMIE de A.Indridason.

LIVRE.
Un suicide , celui de Maria qui pourrait se révéler douteux, d’anciennes disparitions jamais élucidées, un pacte trouble entre une mère et sa fille suite à la mort inexpliquée du père , voilà quelques fils d’une enquête que va mener l’inspecteur Erlendur …., sans oublier que son propre passé le hante : son frère enfant a disparu dans une tempête de neige , lui-même a été retrouvé en état d’ « Hypothermie ».
L’enquête avance à petits pas , mais irrémédiablement vers la lumière grâce à la détermination d’Erlendur qui attentif à des faits mineurs, parvient à les relier, à leur donner sens, en posant les bonnes questions, en vérifiant ses intuitions et en déstabilisant les proches de Maria. La fin surprend, tout en confirmant certaines hypothèses.
L’intérêt du roman tient aussi au fait qu’il est traversé par des interrogations psychologiques et philosophiques, telles la vie après la mort, les contacts avec les défunts , la culpabilité du survivant…,sans oublier le cadre typiquement islandais avec ses lacs, ses hivers rigoureux, ses nuits interminables.

Arnaldur Indridason est l’auteur de plusieurs romans policiers.
« La voix . La femme en vert. Hiver arctique…. »
Souvent, l’intrigue majeure se déroule parallèlement à des enquêtes secondaires qui présentent des points obscurs et qui elles aussi taraudent l’inspecteur. L’intérêt du lecteur part ainsi vers différentes directions.



LA PLUIE, AVANT QU’ELLE NE TOMBE de Jonathan Coe.

LIVRE.
Roman touchant , roman tendre et profondément humain que celui de J.COE .
Dans un testament tout spirituel, une femme âgée se livre et confie son histoire à une enfant, Imogène en enregistrant sa voix sur une cassette retrouvée post mortem.
L’originalité vient de ce que la narratrice appuie son récit sur 20 photos qu’elle décrit, commente et fait revivre pour cette enfant devenue « accidentellement » aveugle…
Chaque photo ressemble à un petit tableau commenté : les détails sont minutieusement décrits, les personnages réactualisés avec vie , intensité au moment précis de la photo.
C’est un travail de ciselage, d’introspection qui nous est proposé. Du grand art !!!
Les photos sont donc le prétexte à dérouler le fil de plusieurs destins qui se sont croisés, dont celui d’Imogène , petite-fille de l’amie de la narratrice. Un secret sera dévoilé, un pardon accordé et on le pressent, la narratrice délivrée d’un lourd poids existentiel.

INCEPTION de Christopher Nolan.

FILM

Intéressante l’idée de pénétrer dans la tête de dormeurs en pleine activité onirique, d’investir leurs rêves, leur subconscient, voire de le modifier ou d’y implanter de nouvelles idées.
Le spécialiste en la matière n’est autre que Dom Cobb, personnage interprété par le brillant Leonardo di Caprio . Il n’est pas seul, car c’est un vrai travail d’équipes qui nécessite de connaître les entrées en matière, les codes, l’organisation interne de l’inconscient et ses niveaux d’accès …Il faut savoir comment initier un rêve, le débloquer et bien sûr comment réveiller le dormeur en douceur.
On l’aura compris, ce film baigne dans la science-fiction et revisite les questions essentielles des secrets d’autrui , du rêve et de la réalité, de ce qui est réel ou imaginé … A ce propos , notre héros a en quelque sorte dépassé les limites du rêve, puisqu’il a inoculé à son épouse une idée, une sorte de virus : lui faire croire qu’elle est irréelle, qu’elle vit dans l’irréel…
Il a réalisé « L’INCEPTION » cad l’implantation d’une pensée , d’une idée neuve dans le cerveau, entraînant par là-même son suicide bien réel ! Cette épouse morte hante ses rêves et tente de l’entraîner vers elle et leur vie fantasmée, renforçant la culpabilité et l’impuissance du héros.

La réussite du film est visuelle : images époustouflantes de cet inconscient peuplé de falaises, de forteresses imprenables, de villes aux immeubles fantomatiques et aux rues qui montent à la verticale , de maisons d’enfance…, autant de métaphores des blocages de l’individu , de ses résistances. Et donc la richesse conceptuelle du scénario est indéniable .
Malheureusement, ce voyage au pays des rêves s’apparente trop à un « James Bond » et perd de son intensité au profit d’une succession de courses poursuites , d’explosions , de fusillades dans des décors de neige complètement décalés.
Finalement, c’est une vision très , trop « technologique » des rêves que nous livre C. Nolan., dépourvue d’humaine sensibilité , de nuances …

Rappelons que C. NOLAN a réalisé de très grands films . Le déroutant « Memento » , « Insomnia » « The Dark Knight » ……..sont autant de récits complexes , abordant de près ou de loin des thèmes liés à la psychologie.

WHITE MATERIAL. de Claire Denis.

FILM
Dans un pays africain, une femme , propriétaire d’une plantation de café, refuse de partir malgré les menaces de guerre civile et la mise en garde de l’armée française qui évacue les lieux. Telle l’héroïne de M.Duras dans « Le barrage contre le Pacifique », elle résiste et tient bon. Ses planteurs se sont « cassés », son ex-mari cherche à revendre la propriété, son fils, ado tourmenté et mollasson traîne au lit la journée …seule Maria s’agite, part en quête d’autres travailleurs au village, décidée à sauver sa récolte.
Peu à peu, autour d’elle, tout fout le camp : le courant est coupé, des enfants-soldats investissent sa maison, le fils pète un câble …etc
Maria est une reine blanche en danger, mais son déni est à la mesure du drame qui se noue : moins du côté des milices qui se rendent maîtres de la propriété que du fils qui par sa faute se retrouvera prisonnier des flammes…

Claire Denis (dont on apprend qu’elle a grandi au Cameroun …) se révèle une réalisatrice talentueuse, subtile, le film est magnifiquement construit . Les premières images nous plongent dans le dénouement du drame et peu à peu, nous remontons le fil de l’histoire à travers le regard d’une Isabelle Huppert hagarde et prostrée.
L’actrice, une fois encore, crève l’écran , elle interprète avec sensibilité et sobriété l’immobilisme actif de cette femme, à mi-chemin entre innocence et inconscience qui s’accroche malgré les nombreux signes de délitement qui s’accumulent. Les autres acteurs jouent tous très juste et on saluera la prestation de Christophe Lambert en ex-mari, sans réel pouvoir, ni influence.
Au-delà du drame familial, ce sont aussi 2 mondes qui se rencontrent, celui des Blancs qui possèdent le « white material » et celui des Noirs qui goûtent dans le plus grand désordre au luxe des civilisés : un briquet en or, un collier ciselé, une baignoire, des médicaments, même des doudounes…La réalisatrice a eu l’intelligence de ne pas « dater » précisément ce récit, lui laissant ainsi sa portée universelle.