jeudi 19 décembre 2019

La Cordillera de Los Suenos de Patricio Guzmán

FILM***

"Oeil d'Or" du festival de Cannes 2019.
Meilleur film documentaire.
L'Oeil d'or est au documentaire ce que la Palme d'Or est au film de fiction.
Très beau film/documentaire à la fois poétique et politique...
Images sublimes de la Cordillère des Andes et en même temps, extraits d'images de l'époque de la dictature de Pinochet,1973: répression sauvage, attestations arbitraires etc ...
Comme un chant mélancolique ...et assez désespéré d'un chilien,Patricio Guzmán,
pour son pays.
Le CHILI qui est si meurtri, dépossédé de ses biens,victime d'un libéralisme outrancier.
Voici le trailer où l'on entend cette voix qui s'exprime dans cette belle langue espagnole:


http://www.allocine.fr/…/player_gen_cmedia=19585442&cfilm=2…





mercredi 4 décembre 2019

THE IRISHMAN de Martin SCORSESE

FILM

Martin Scorsese s'est offert le luxe d'étirer son propos sur 3h39,temps de la confession d'un des témoins/acteurs de la mafia italienne aux USA.
C'est la voix off de Franck Sheeran/De Niro qui nous raconte cet univers de violences,de pactes,de trahisons...et aussi de meurtres indissociables du milieu.
Et le spectateur assiste,sans ennui,à cet enchaînement d'intrigues...
C'est toute une vie qui passe sous nos yeux jusqu'à l'extrême vieillesse où le héros en maison de retraite semble n'éprouver aucun regret.
La figure impassible,taciturne, inquiète aussi de l'acteur est à elle seule un must.
Quel acteur!!! 🎉... qui garde toute sa puissance d'expression 👏... sans éclipser le jeu d'Al  Pacino et ...surtout celui de Joe Pesci,ancien comparse des films de Martin Scorsese.
Film crépusculaire, sûrement,vu le
souffle mélancolique de cette oeuvre, de ce temps qui passe et dont il ne reste rien sinon des souvenirs. 
Mais aussi film qui étonne par sa vigueur et sa mise en scène impeccable.
Un bémol quand même,certains dialogues s'éternisent inutilement...entre celui qui veut à tout prix avoir raison, pendant que l'autre ne veut rien entendre 😂.


C'est comme une apothéose de tous les films de gangsters que le réalisateur a tournés. 
Il en rêvait depuis des années et après avoir essuyé les refus des producteurs d'Hollywood (pendant 9 années),il présenta son projet à Netflix qui accepta de financer le film: 169 millions de dollars!!!  
On peut saluer la persévérance,la ténacité de ce réalisateur qui nous enchante depuis longtemps.

ORDESA de Manuel VILAS

LIVRE***

Ce livre de l'écrivain espagnol,MANUEL VILAS a été désigné Meilleur livre de l'année par les grands quotidiens El País et El Mundo.
Amplement mérité. 

Dès les premières pages de ce récit,l'écrivain nous emmène dans son univers personnel,intérieur.
Il donne accès à sa personne,à sa vie présente et passée et surtout au lien si fort qui le relie à ses parents maintenant morts (pas décédés,il n'aime pas ce terme),l'occasion d'évoquer tant et tant de souvenirs tels l'auto,la Seat 600 à laquelle son père était si attaché,une terrible dispute un soir de Noël,le mariage de ses parents,un1er janvier 1960,l'hôtel où la famille séjournait dans la station de skis,souvenirs accompagnés parfois de photos noir et blanc.
Le lecteur perçoit une forte charge émotionnelle.L'écrivain voudrait en savoir plus sur tel et tel fait,événement,comprendre le sens de leurs actes,de leurs choix mineurs ou pas...
mais bien sûr ses parents sont partis avec leur histoire,leur vérité,leurs secrets,ils ne sont plus là pour répondre à des questions obsédantes.
Il soulève un voile délicat sur cette enfance en Aragon (il a grandi dans cette région du Nord de l'Espagne,pas très éloignée des Pyrénées),mais surtout sur la vie de ses parents,sur ce mystère de l'autre qui maintenant n'est plus là pour expliquer,témoigner...
Terrible absence,insoutenable absence qui en fait un vrai naufragé de la vie.

D'ailleurs,l'écriture semble parfois somnambulique,sous Prozac,affolée même...mais aussi tellement humaine,si ancrée dans les détails du réel qu'elle renvoie chacun à des questions,des émotions insoupçonnées.
Il invite à poser les questions tant que les parents sont là!!!
Il évoque cela,p 128 où il s'interroge sur la raison de la destination de leur voyage de noces,en plein hiver: Lourdes.
Pourquoi Lourdes? et pas Madrid ou Barcelone,plus proches...
Question dont il n'aura jamais la réponse.
"Pourquoi ne les ai-je pas interrogés quand j'en avais le loisir sur les raisons qui les ont poussés à aller dans cette ville[...]La réponse est évidente:je n'ai pas posé la question quand je le pouvais en remettant cela à plus tard,comme s'ils allaient toujours être là.
.... si tu dois interroger quelqu'un sur tel ou tel sujet,il faut le faire tout de suite.

N'attends pas demain,car le lendemain appartient aux morts"*****


Ailleurs,il évoque sa mère: 
"Il y a longtemps que personne ne m'a demandé des nouvelles de ma mère.
 Je n'entends plus son nom dit à voix haute. 
Je n'entends plus sa voix. 
Je ne me rappelle plus sa voix. 
Si je la réentendais, je me mettrais peut-être à croire à la beauté du monde."p268.

Et encore ceci qui illustre bien le sujet du livre:
"Le passé,ce sont des meubles,des couloirs,des maisons,des appartements,des cuisines,des lits,des tapis,des chemises.
Chemises que les morts ont portées.Et des après-midi.Le passé,ce sont les après-midi,en particulier ceux du dimanche où se produit une suspension de l'activité humaine...",p225.

Et plus haut,l'écrivain écrit suite à une visite de ses deux fils:
"...un déjeuner du dimanche avec Bra et Vivaldi me conduit à vouloir savoir quels souvenirs mes fils en auront dans trente ans.
Ce repas me laisse entrevoir les mystères du présent ...Quels souvenirs auront-ils des déjeuners dominicaux quand je serai mort et devenu un horizon lointain?",p225. 
 
 

lundi 2 décembre 2019

NÉ D'AUCUNE FEMME de Franck BOUYSSE

LIVRE***

Quel roman!!!
Quelle écriture et quelle humanité!!!

Après "GLAISE",j'ai lu ce livre sorti en 2019.Un émerveillement.
Pour illustrer le sujet de la détresse de l'adolescence,de l'abus,de l'abandon des victimes,l'écrivain a choisi ROSE,jeune adolescente,vendue par son père à un riche châtelain.La voici comme emmurée vivante dans un château isolé entouré d'une forêt,loin de tout,loin des siens,car Rose est l'aînée de 4 soeurs et on suit dans le roman le vécu des soeurs,de la mère surtout et du père rongé par la culpabilité de son geste.
Son destin,sa vie,ses tourments,son combat nous sont rapportés dans les cahiers de Rose retrouvés près de son corps.
Écrits dans une langue simple,familière sans apprêts et en même temps si intense,si touchante.On peut y ajouter la polyphonie,car les témoins,acteurs,actrices du récit expriment leur point de vue à plusieurs reprises.L'époque où se situent les faits reste indéterminée.

On est submergé par l'émotion en lisant cette histoire terrible,implacable.
Le Mal à l'oeuvre dans toute sa bassesse,sa lâcheté,son cynisme absolu.
Une lecture qui marque...fort. 
 Un extrait pour illustrer: 
"Seul le passé nous travaille le corps. Il finit toujours par remonter à la surface, comme un bouchon de liège privé de lest. 
Les légendes qui l'encombrent sont le fruit de grandes passions, de grands rêves et d'incommensurables souffrances; tout cela et rien de plus que cela. Les légendes elles vieillissent , se délitent avec nous, se recomposent avec d'autres, à l'infini"

lundi 25 novembre 2019

GLAISE de Franck Bouysse de 2017

LIVRE***
Quelle écriture,quelle puissance d'évocation dans ce roman!!!
Il y a du Zola là-dedans,mais aussi du Giono,du Bosco.
Monde de la ferme,de la campagne avec ses travaux saisonniers,ses exigences,ses êtres rustres et forts,son isolement aussi...
Nous sommes à l'été 1914,les hommes sont enrôlés,les chevaux aussi et c'est la débrouille qui commence pour la famille de Victor qui laisse derrière lui sa mère,sa femme et Joseph,fils de 15 ans.
Ajoutez-y des voisins peu aimables,voire haineux et envieux...et une nièce,Anna,belle comme un coeur...Voilà le décor planté,théâtre de passions fortes,violentes,destructrices.
Bref,une histoire d'Amour et de Mort,terreau de tous les grandes oeuvres littéraires.

Immense talent de cet écrivain originaire du Cantal,pays de montagnes.
Certains passages sont des bijoux de style,notamment une scène d'anthologie avec l'irruption d'un chien dans une église et la réaction du prêtre officiant,p112 à 116.

Et aussi ce dernier repas avant le départ de Victor pour le front.Voici.
"La journée passa.Ils dînèrent,échangeant à peine quelques regards pendant le repas déviant aussitôt leur course de peur[...]
Ils mâchaient fort et faisaient semblant que chaque geste requît toute la concentration dont ils disposaient,afin qu'il n'y eût d'espace pour rien d'autre que le transport des aliments vers leur bouche et l'action de leurs bruyantes mâchoires."p27.
C'est comme si on y était... à ce repas.

Et aussi les instants où la mère sent que sa vie s'en va: 
"Marie ne quittait plus guère son lit.Le dos collé à un oreiller garni de duvet d'oie,elle visitait sa mémoire en approchant du gouffre."p 144
C'est magnifique.

dimanche 10 novembre 2019

Par les routes de Sylvain Prudhomme

LIVRE

J'avais hâte d'ouvrir un roman dont la figure centrale est un "autostoppeur".
J'ai moi-même abondamment pratiqué ce moyen de déplacement,quand j'étais étudiante,mais aussi lors de voyages,voire même dans ma propre ville.
C'est facile,ça ne requiert rien de particulier,ça demande juste une certaine dose de patience.Confiance aussi qu'à un certain moment,vous allez être embarqué vers votre destination.
Bref,lecture tentante et prometteuse.
Et en effet,l'autostoppeur,ami de longue date du narrateur,Sacha est un passionné de ce "sport".
Ce sont les rencontres qui l'intéressent,les échanges qui ont lieu dans l'habitacle,l'histoire de ces conducteurs (parfois aussi conductrices) avec qui on partage de façon éphémère un vécu,une vérité ou rien...On peut aussi se taire ensemble,bien que ce soit plus rare.
C'est l'humain qui le transporte,dans tous les sens!!!
De retour de ses frasques,de ses expéditions,il partage avec Sacha et les siens les moments sublimes,pathétiques ou ordinaires qu'il a vécus (joli chapitre 13 où les phrases commencent par "Est-ce que je t'ai raconté"...?)
Il leur montre des photos aussi en les commentant abondamment...
Extrait:
"Il aimait les autoroutes. La glissade des autoroutes. L'impossibilité de faire marche arrière. Sur l'autoroute on ne se retourne jamais, il disait. 
Pas de place pour le repentir. On s'arrête le temps de franchir un péage, de refaire le plein. Et on repart. Marche avant, toujours. On avale l'espace.On le vainc. On le mange. Arrivée prévue dans 5 heures et 7 minutes...
Ce n'est plus de l'espace. C'est du temps. Une pure quantité de temps qu'on regarde fondre. Il y a ceux qui se tiennent au bord du fleuve, il répétait. Et il y a ceux qui sont le fleuve. Il soutenait que c'était la petite ferme située de l'autre côté de la rambarde qui ratait la France, certainement pas lui."p108. 

L'écriture est naturelle,déliée,simple...mais ces qualités suffisent-elles à maintenir l'intérêt du lecteur?...Pas sûr.
Au fur et à mesure de la lecture,les rebondissements mineurs (cartes envoyées,coups de tél surprise) et quelques soubresauts narratifs ne parviennent pas à effacer un rythme assez répétitif:ce sont les mêmes départs,les mêmes retours de l'autostoppeur,à force,ils deviennent lassants.La monotonie s'installe et on ne regrette pas de refermer un roman qui n'a pas tenu toutes ses promesses.

lundi 28 octobre 2019

LE DERNIER THRILLER NORVÉGIEN de Luc Chomarat

LIVRE

L'écrivain s'est amusé à parodier les polars nordiques.
Au-delà de l'exercice de style,du plaisir du pastiche,de quoi s'agit-il?
Un éditeur parisien fraîchement débarqué à Copenhague va se retrouver dans un imbroglio policier où lui-même se révèle un suspect potentiel.
Ensuite,c'est une série d'aventures rocambolesques,de scènes absurdes et délirantes.
Cela fourmille de clins d'oeil aux auteurs:Jo Nesbo,Hennig Mankell...On y retrouve un policier Willander,un autre Bjonborg...L'éditeur s'appelle Delafeuille...
C'est du lourd,...du très gros lourd!!!
Un humour qui plaît sûrement à beaucoup,mais qui m'a laissée de marbre.
C'est too much.
Le style est léger,branché,parfois vulgaire...Un exemple:

"- Votre sens de la litote commence à me courir, Holmes.
- Ta gueule, Delafeuille.
- Putain de ta race. Je vais t'arracher les couilles.
- Ne vous laissez pas manœuvrer. Ces dialogues à l'emporte-pièce, de la dernière vulgarité, ne nous ressemblent pas. Il tente de nous priver de nos traits caractéristiques, de nous faire disparaître en tant que personnages crédibles et unifiés.
- J'essaie de me ressaisir mais c'est difficile.
- Tenez bon.
- C'est pas stable. Chaque phrase qui s'amène trimballe un danger potentiel.
- Oui, c'est très passionnant, d'un point de vue littéraire.
- On est presque dans le cadavre exquis.
- Pas mal pour un polar, même nordique.
- Ta gueule, Holmes.
- Tu n'es qu'un fils de pute, Delafeuille. Je vais t'enfoncer le canon d'un 357 dans le cul.
- Fait chier. Non seulement nous perdons de notre crédibilité, mais il essaie de semer la zizanie entre nous",p100 


Bref,comme on dit:Faites-vous votre propre opinion.

 Voici l'extrait d'un avis lu sur le site de Babelio (paleoliticgirl) qui dézingue le roman:
" ... à un effet de mode mais personnellement, je n y ai vu que quelque chose de mal écrit, avec des répétitions inintéressantes et chiantes, une histoire sans queue ni tête dans laquelle la réalité et la fiction sont tellement liées que plus aucune des deux n' en restent crédibles, le tout assaisonné à la sauce termes anglais,en veux-tu en voilà.... On a, à un moment une apologie des marques..."
 

vendredi 25 octobre 2019

Le sosie d'Adolf Hitler de Luigi GUARNIERI,2017

LIVRE

Le roman de L.Guarnieri,traduit en français en 2017,est né d'une troublante question.
Est-ce vraiment Hitler qui s'est suicidé dans le bunker de la Chancellerie,le 30 avril 1945?
Ou bien un de ses sosies?
L'écrivain"imagine" ( c'est bien un roman!!!) qu'une opération,nommée Opération Janus,est créée en février 1945.
Il s'agit de chercher des sosies pour pallier les défaillances,absences de plus en plus fréquentes du Führer et préparer une éventuelle doublure dans les apparitions publiques.
On choisit notamment un certain Mario Schatten,musicien aguerri,on l'enferme à la Chancellerie,le tenant ainsi au chaud en cas de nécessité ...ou en cas de fuite d'Hitler.
En effet,les Russes se rapprochent dangereusement de Berlin qu'ils investiront début mai.
On fait subir au malheureux les transformations physiques nécessaires et surtout,un douloureux arrachage de dents afin de les remplacer par les bridges d'Hitler,car ,en cas de décès,les dents sont seules à même de certifier l'authenticité du défunt.

La vérité historique des derniers instants d'Hitler est interrogée et racontée avec brio.
Description des attitudes,réactions de l'entourage dans le bunker,mais aussi précisions sur les corps d'Hitler et d'Eva Braun.(Chapitre intitulé:"HITLER KAPUTT"!!!,p173 à 202.)
Les questions sont légion:sont-ils morts par balle ou brûlés ou se sont-ils empoisonnés au cyanure comme beaucoup de responsables SS?
Ou y a-t-il eu une mise en scène après-coup des Russes?
Un agent secret imaginé par l'écrivain mène une enquête qui va le mener en Amérique du Sud où il interroge le SS responsable de l'Opération Janus à l'époque,un certain Egon Sommer...ensuite,il rencontre la dentiste qui aurait fabriqué les bridges d'Hitler.
Il cherche aussi à contacter la fille de Mario.Il s'avère que séparée de son père enfant,elle a été maltraitée et est internée dans un hôpital psychiatrique...Terrible.
Enfin,les Russes qui ont arrêté le dit Mario croient mordicus que c'est bien Hitler et le torturent pour qu'il avoue ,en vain...Il est envoyé au Goulag dont l'écrivain ne nous épargne aucun détail.Travail harassant/faim/nourriture insuffisante/froid insupportable...(p267à 300)
Le malheureux tentera de s'enfuir et mourra gelé...Terrible.
C'est donc une enquête passionnante,souvent dramatique qui est proposée au lecteur.
Comme dans d'autres romans*,l'écrivain italien brode à partir de faits ou de personnages historiques et il le fait avec originalité et dans un style très abouti.
BRAVO***

*(dans d'autres romans,il s'est inspiré d'un tableau de Rembrandt "La fiancée juive" ...et aussi du célèbre faussaire de Vermeer,le fameux han van Meegeren.
L'écrivain,chaque fois,se documente abondamment sur le sujet qu'il traite.)
Il faut aussi épingler un portrait d'HITLER,p237 à 240...Un Hitler "charlatan mégalomane".
 

mercredi 16 octobre 2019

Les génériques de QUENTIN TARANTINO



 LES GÉNÉRIQUES de Quentin Tarantino***

A l'occasion de la sortie de Once upon a time... in Hollywood,la chaîne ARTE* (lien en bas de la publication),émission Blow up a consacré une publication de +/- 10 minutes aux génériques des films de Tarantino,caractéristiques des goûts du cinéaste,bien sûr.
C'est l'occasion de revoir quelques débuts et leurs clins d'oeil au 7ème Art.
Le long travelling de Jackie Brown qui marche dans l'aéroport...
Uma Thurman au volant,au début de Kill Bill...



                              Pam  Grier       
                            
                            
             
                                                              Uma Thurman                                                                              


Quelques actrices et acteurs,complices du cinéaste:
  
 

                                    
 Samuel L. Jackson.....John Travolta...Harvey Keitel...
               


*Voici le lien d'ARTE:
 https://youtu.be/XT0OGuLybZo

LES INVISIBLES de Roy Jacobsen

LIVRE***

C'est un défi de raconter une histoire à la fois si poétique et riche en rebondissements.
Défi relevé.
Ce roman est d'une poésie absolue assortie de descriptions précises et minutieuses,alliant pudeur et puissance des émotions:
Exemples:
"C'était comme s'il pleuvait à l'intérieur d'elle--même,le ciré ne servait à rien."p100.
 "Et Ingrid sentit cette force que seul un oiseau connaît,quand il est perché sur le sommet d'une montagne,les ailes déployées,et sait qu'il peut laisser le vent faire le reste."p204 

Le temps s'arrête sur cette île norvégienne où vit une famille confrontée aux tempêtes dévastatrices,à l'hiver implacable,aux aléas de la pêche...
Ils dépendent de quelques bêtes pour survivre...,de la récolte de la tourbe (p106) pour se chauffer,de l'adresse du père Hans qui fabrique des chaises (p133),construit un ponton où accostent de rares embarcations...
Et puis la mère Maria qui se tait dans toutes les langues et la fille Ingrid,impétueuse,solitaire qui grandit et comprend vite les enjeux,les silences...
Elle est la figure centrale du roman.
"Ingrid se leva et,par la fenêtre vit ses parents marcher côte à côte dans les prés...
Ils discutaient.Son père enlaçait sa mère...ils marchèrent main dans la main,se lâchèrent la main...Ingrid n'avait rien vu d'étrange,elle n'avait rien vu qu'elle ne comprenait pas,elle avait vu quelque chose qu'elle n'oublierait jamais."p103. 

Grande économie de style qui caractérise tout le roman.
L'écriture est sèche,fulgurante.
On ne s'attarde pas ,on ne commente pas,on décrit,on dit les faits et on avance.
Vraiment,une grande réussite littéraire***
Le roman a été traduit en 2017 en français,il est sorti en éditions de poche,7,40€.


 

vendredi 11 octobre 2019

Nouvelles morales provisoires de Raphaël ENTHOVEN

LIVRE

Après "Morales provisoires",2018...
Voici les "Nouvelles morales provisoires"qui reprennent le principe du précédent ouvrage:prendre distance avec l'actualité,en la questionnant,en la passant au crible,en prenant parfois le contre-pied de l'opinion ambiante,du consensus général.
Ce sont des sujets d'actualité de tous genres qui sont ainsi scannés.
Prises de position et attitudes d'hommes politiques (Hollande et Mélenchon sont 2 clients de choix...),de journalistes,débats moraux comme la PMA...,des innovations technologiques comme la puce sous la peau ou l'émoticone...et bien sûr,des analyses plus philosophiques sur l'art/la liberté,p293/le "Notre Père"p287/la victimisation,p167/Épicure,p182...
Il évoque aussi la magie du passé simple,p232.
(Voici le lien pour écouter cette magnifique chronique:
https://youtu.be/aNN0JmlHmGI)

On l'aura compris,les sujets sont d'une extrême variété.
L'écriture est vive,efficace.Comme il s'agit de très brefs chapitres 2/3 pages maximum qui à l'origine ont été diffusés sur Europe 1,on ne se lasse pas.
Parfois,on se prend à sourire: la description des consignes de sécurité*** qui nous attendent à chaque décollage est hilarante et... poétique.Oui,oui.
Voici:
... ce n'est plus une obligation légale et fastidieuse que l'on contemple,mais une danse,un haka,un moment de nô...La chorégraphie qu'un automate offre à un aveugle en signe de bienvenue." p417.

Et à propos d'Épicure:"Tout est matériel,même les idées sont des atomes qui s'indignent" !!!...J'adore.

 

 

jeudi 10 octobre 2019

WERK OHNE AUTOR ou Never Look away ou "L'oeuvre sans auteur de Florian Henckel


FILM ***
Ce film a la pureté du cristal.
Réalisé par l'auteur du magnifique "La vie des autres",2006 où un capitaine de la Stasi qui mettait sur écoute un auteur de théâtre et sa famille,peu à peu vire de bord et supprime les éléments compromettants.Belle rédemption.
Le film fut récompensé de l'Oscar du meilleur film international.

Cette fois encore,c'est l'Allemagne nazie,puis communiste qui constitue la toile de fond du film.C'est l'histoire de Kurt, jeune artiste qui d'abord imprégné de la culture artistique de l'Est passe à l'Ouest en 1961 et découvre une tout autre expression artistique.
Il tombe amoureux de la fille d'un médecin ex-nazi,passé sous protection communiste qui a un lien direct avec un drame que l'enfant a vécu et qui le hante.
Intériorité absolue du personnage principal***
Sa rage retenue,sa tension exploseront dans la création artistique.
Grand bonheur de pouvoir assister en temps réel à la genèse d'un tableau,à la fin du film.
                                    




Le film évite les poncifs,les clichés sur l'art.Le prévisible n'advient jamais.C'est parfait.
Il semble que le cinéaste allemand se soit librement inspiré de la vie du peintre Gerhard Richter.

                          
                           

lundi 23 septembre 2019

La goûteuse d'Hitler de Rosella Postorino

LIVRE

Ce roman d'une auteure italienne a connu un grand succès de librairie en ce début 2019.
On l'a appris après la guerre,Hitler inquiet pour sa vie exigeait que l'on goûte sa nourriture.

Et une dizaine de jeunes allemandes furent destinées à cette fonction.
C'est l'histoire de Rosa qui chaque jour est amenée en car dans un lieu où sont présentés les différents repas servis au Führer qu'il s'agit de goûter.
C'est une sorte de filet anti-empoisonnement et bien sûr manger constitue un acte assez terrifiant pour celles qui "goûtent" dans une inquiétude permanente.
Des liens d'amitié,de solidarité se nouent entre ces jeunes filles.
Le mari de Rosa parti au front est porté disparu et une idylle se noue peu à peu entre elle et un SS.

Ce roman m'a rappelé Olga de B.Schlink par cette ambiance des années de guerre,cette suspicion,cette angoisse qui les caractérise.
Roman très lisse,assez convenu quand même.
Ce n'est pas de la grande littérature,loin de là.
Les intervenants de l'émission du Masque et la Plume,émission du dimanche soir sur France Inter,ont descendu le livre en flèche!!!
Voici le lien:https://www.franceinter.fr/livres/la-gouteuse-d-hitler-de-rosella-postorino-le-point-godwin-de-la-litterature

jeudi 19 septembre 2019

LUCA de Frank Thilliez

LIVRE

Quand un cinglé s'en prend aux dérives de la technologie et dénonce les Gaffa et qu'il menace d'exécuter 2 personnes,un homme et une femme en direct sur les réseaux sociaux,la brigade du commandant Sharko se mobilise immédiatement.
Comment empêcher l'issue fatale de cette scène macabre suivie en "live" par des milliers d'internautes? 
C'est une fois encore la course contre la montre,le compte à rebours.
Vite réunir des indices,recouper des liens,...surtout trouver le lieu exact.
Tout cela prendra le temps du récit.
Ce sera une terrible chaîne de personnes impliquées:des mères porteuses,des enfants-médicaments,des médecins obsédés par des manipulations de l'ADN,par la quête d'immortalité,par le ralentissement du processus de vieillissement,grands thèmes des transhumanistes!!!
Un vrai "clan" aux pratiques monstrueuses,inhumaines. 
Ce sera une vraie descente aux enfers pour l'équipe d'enquêteurs qui vont de surprise en surprise...pour le lecteur addict aussi bien sûr.
De roman en roman,l'écriture de Thilliez s'affine alors qu'il traite de sujets aussi complexes que les dérives médicales et informatiques.
Plaisir de lire et de se laisser emmener dans cette enquête sulfureuse.
 

mercredi 18 septembre 2019

PARASITE de Bong Joon Ho

FILM

Palme d'Or ***du dernier festival de Cannes.
On comprend que le film du sud-coréen ait emballé le Jury.
Narration parfaitement maîtrisée.
Originalité du sujet:le subvertissement d'une famille par une autre.
Suspense constant.
Analyse sociale teintée d'humour.
On passe en douceur de la grosse farce machiavélique au drame rocambolesque.
Le film est assez inclassable:entre thriller/comédie/film social...

Les nombreuses qualités du film sont indiscutables.
Excellent jeu de tous les acteurs/actrices.
Contraste très réussi entre les 2 lieux d'habitation,entre les ressentis des habitants,riches d'un côté,pauvres de l'autre...notamment lors d'une pluie diluvienne qui noie les uns et s'offre comme un beau spectacle au regard des riches.
Scénario plein de trouvailles géniales,comme l'ampoule qui clignote et se décode en alphabet morse,scénario bondissant qui emmène le spectateur de surprise en surprise.
Rien n'est prévisible,vraiment rien...et surtout pas cette fin géniale.
Et pourtant,...je suis restée assez à distance de cette tragi-comédie. 

La scène d'ouverture où les ados assis à côté du WC cherchent une connexion Wi-Fi gratuite,très prometteuse pour la suite.Les voici:

                                



Dans la famille des riches,je demande la mère,rôle central dans le film.
Elle est parfaite dans ce personnage de mère un peu nunuche,naïve,totalement enfermée dans ses soucis de petite bourgeoise nantie.
La voici:                             
 

lundi 16 septembre 2019

La double vie de VERMEER de Luigi Guarnieri,2007

LIVRE

Après "La jeune mariée juive"*du même écrivain italien,j'ai lu cet ouvrage sur Vermeer ou plutôt sur l'incroyable histoire de ce faussaire hollandais,Han Van Meegeren qui au début du 20ème siècle a berné les critiques d'art les plus réputés,en leur faisant expertiser des tableaux qu'il a présentés comme d'authentiques Vermeer.
Il a commencé par peindre la scène des disciples à Emmaus et a continué son entreprise de génial imitateur.Ce n'est qu'en 1945 que la police vient l'interroger à propos de la collection que Goering a constituée pendant la guerre.La supercherie,l'immense arnaque éclate alors au grand jour et l'artiste de devoir prouver devant un comité d'experts que c'est bien lui l'auteur de ces tableaux,des faux Vermeer donc.C'est surréaliste!!!

Ce qui est passionnant,c'est toute l'époque où habitant à Nice,le faussaire s'exerce à son art d'imitateur de génie,choisissant les sujets,le support,les pigments d'époque (p68/69 le bleu lapis-lazuli ...le jaune célèbre de Vermeer,etc...)pour résister au scanner,enduisant ses tableaux d'une couche d'encre de chine,faisant des craquelures aussi.
Tous ces détails techniques se lisent comme autant d'indices d'un vrai polar pictural.
Dans un autre chapitre IX,est évoqué le personnage de Proust,Bergotte qui "meurt d'une attaque d'apoplexie après avoir admiré la "Vue de Delft" de Vermeer",p104.
Ce détour par l'oeuvre de Proust est tout à fait intéressant.
Et pour finir,on en apprend beaucoup sur ce personnage de Goering,passionné d'art qui s'était constitué pendant la guerre une fabuleuse collection d'oeuvres.
Son procès à Nuremberg est évoqué ainsi que les circonstances précises de sa fin par suicide (chapitre XVI)
Un roman bien ficelé donc,dont l'intérêt littéraire se conjugue avec un intérêt artistique et historique.

* lien de la critique du livre:
https://parlonscinebouquins.blogspot.com/2019/08/la-jeune-mariee-juive-de-luigi.html