lundi 21 septembre 2020

YOGA d'Emmanuel CARRÈRE


 LIVRE***

Gros COUP DE COEUR ❤️❤️❤️
Non,ce n'est pas un traité sur le Yoga ou la méditation...
C'est un chant d'humanité.
C'est le récit bouleversant, ... parfois déchirant d'un homme qui se bat avec ses démons,sa part d'ombre,qui chaque matin part à la reconquête de lui-même... à tâtons, à reculons parfois...
C'est d'une sincérité absolue....avec aussi des touches d'humour,si indispensables pour des sujets graves.
Emmanuel Carrère ne se prend pas au sérieux,
il ne se la raconte pas...
il se livre,nu, désœuvré, incertain,...dans une écriture accomplie,fluide,vivante.
On se laisse emporter par la puissance émotionnelle de cette prose.

Le livre se développe en trois parties:la première méditative,la seconde autobiographique et la troisième humanitaire et donc il n'est pas question que de Yoga dont l'écrivain "s'amuse" à nous proposer une série de définitions.Voici un extrait:

"...la MÉDITATION, c’est tout ce qui se passe en soi pendant le temps où on est assis, immobile, silencieux. L’ennui, c’est la méditation. Les douleurs aux genoux, au dos, à la nuque, c’est la méditation. Les pensées parasites, c’est la méditation. Les gargouillis dans le ventre, c’est la méditation. L’impression de perdre son temps à faire un truc de spiritualité bidon, c’est la méditation. Le coup de téléphone qu’on prépare mentalement et l’envie de se lever pour le passer, c’est la méditation. La résistance à cette envie, c’est la méditation – mais pas y céder, quand même. C’est tout. Rien de plus. Tout ce qui est en plus est en trop"

Les néophytes en apprennent davantage sur les stages de Vipassana,les vritti,semblables à ces petits singes qui sautent partout,telles nos pensées désordonnées,sur l'importance des narines (Extrait: « Il se passe tout le temps quelque chose dans les narines. On peut méditer deux heures sur les narines, sans s'ennuyer. »,du souffle:Inspire/expire...etc.

La seconde partie ressemble à une descente aux enfers:dépression,hospitalisation,médications fortes,électrochocs,pensées suicidaires...Il coche toutes les cases d'une souffrance morale intense.Terrible.Et ce qui lui arrive nous touche,nous émeut,car l'humain est au coeur de cette tornade personnelle.

On le retrouve enfin sur une île grecque où affluent des réfugiés,notamment afghans et le voilà embarqué dans un atelier d'écriture pour ces jeunes hommes qui ont ainsi l'occasion d'exprimer à l'écrit le cauchemar de leur départ d'Afghanistan,l'arrachement à leurs familles,les conditions apocalyptiques de leur voyage...il assiste une jeune femme,aussi éprouvée par la vie que lui-même et crée avec elle des liens d'amitié,de joie,de ressourcement.

Il fait sienne cette citation de Michaux:

 « Rends-toi, mon cœur, nous avons assez lutté. Et que ma vie s’arrête. On n’a pas été des lâches. On a fait ce qu’on a pu. »Que c'est beau.

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