Ce roman est terrible,oppressant.Les
mots,les phrases font aussi peur que des images au cinéma.L'effet de
cette écriture est incroyable.En effet,elle tient du Nouveau
roman,de ses choix esthétiques,mais elle elle est habitée par une
densité émotionnelle rarement atteinte.Un cas d'école,vraiment.
C'est une sorte de huis clos campagnard qui réunit une
famille et la voisine,un soir d'anniversaire
....la
fête quoi...c'est sans compter l'arrivée d'invités surprises qui
mélangent agressivité et ton mielleux.
Ce sont 3 frères qui
veulent en découdre.
Pourquoi ? On le découvre au cours de ces
600 pages qu'on lit avec effroi.
Impossible de lire le soir
Mais
ce style élaboré:longues phrases, monologues intérieurs,
projection vers l'après...
est magnifique.
Quel art de
décrire l'énorme charge émotionnelle de la frustration, du
ressentiment que vit un des intrus quand il comprend que Marion le
méprise, qu'elle ne reviendra jamais. L'orgueil du mâle
blessé,c'est une bombe humaine. La description de la petite
fille,accroupie contre le mur de la salle de bain,tétanisée,
entendant les bribes d'une conversation dont le sens lui échappe
complètement.p574. "Comme un rideau déchiré "!!!
L'écrivain étire les phrases à n'en plus finir il
s'attarde,ralentit infiniment chaque geste,chaque sensation... Juste
incroyable.Soulignons que la structure du roman est fidèle à la "Règle des 3 unités" (Lieu/Temps/Action),caractéristique notamment de la tragédie racinienne:même lieu,quelques heures pendant lesquelles une intrigue resserrée se noue,se déploie et s'achève.C'est ça.
Pourquoi ce roman n'a-t-il pas été retenu au
Goncourt ???
Inexplicable mystère ???
Quelques
extraits:
"Ça non,Patrice n'y pense pas.Il s'assied tous
les soirs,à l'heure du repas,dans la cuisine de son enfance,et,même
entièrement refaite,on n'y peut rien,rien ne change dans le secret
du temps,il ne suffit pas de rénover,retaper,cacher sous la peinture
et la modernité,il y a toujours qui affleurent,des relents d'une
époque qu'on voudrait oublier..."p83.
Sur la
peur:"...Elle a réussi à maîtriser cette frousse qu'elle
avait plus redoutée qu'un danger réel,oui,car au moment d'entrer
dans la salle de réunion il lui avait fallu dominer la peur qu'elle
avait eue de succomber à sa peur,car elle avait craint de se laisser
submerger par elle,de se laisser paralyser par elle,d'être empêchée
par elle au point de ne pas savoir répondre quand on commencerait à
la mettre sur la brèche,sur le gril..."p270.
"Marion
et Patrice,eux, rechignent à lever leur verre qui pèse une tonne de
haine et de colère...."p448.
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