samedi 14 novembre 2020

Les secrets de ma mère de Jessie BURTON


 LIVRE****

A partir de "Qui était ma mère?" vient "Qui suis-je?".Telle est la vertigineuse question qui porte ce récit attachant,brillant. Pour Rose qui n'a jamais connu sa mère,il est vital de retrouver des êtres qui l'ont connue... et des pistes et indices.Une célèbre écrivain l'aurait connue,aimée?...s'engage alors un récit qui s'articule sur deux périodes:celle de la jeunesse de sa mère,Elise dans les années 80 ...et 2017,celle de Rose en quête de réponses.

La question de l'identité,de la construction de soi est au coeur du roman.Roman féministe qui a des accents à la Virginia Woolf notamment quand l'écrivain interroge la maternité:les malaises de la grossesse,le désarroi en présence du bébé,les failles,les doutes de la jeune mère.P431:"Elle n'admettait pas les pensées qui la hantaient;les cauchemars de la journée...qu'elle exerçait un pouvoir sur ce bébé impuissant...Qu'elle avait une fille dont elle n'arrivait pas à s'occuper...qu'elle était aimée,mais ne savait pas comment accueillir cet amour.On ne pouvait pas compter sur elle.Elle en était incapable,incapable..."  

La dynamique du couple,hétéro ou homo est aussi fort présente.Les rapports de force,la jalousie,les scènes,la lassitude...tout ça est vécu par les différents protagonistes du roman.A un moment,Rose s'affronte à Joe,son compagnon à propos des cadeaux qu'elle prépare pour Noël...cette scène de dispute est génialement écrite,décrite dans son crescendo dévastateur qui aboutit aux immanquables injures et leur point de non-retour ...car bien sûr,Rose n'ira pas passer Noël dans sa belle-famille et elle quittera leur appart pour de bon.Pas évident une scène de dispute qui ne soit pas trop "cliché",qui soit crédible!!! (p266 à 268).

D'autres extraits révèlent ce style si agréable,plein d'élégances et de naturel.Jessie Burton est une immense conteuse,elle l'avait déjà prouvé dans ses précédents romans aux thèmes très différents. 

Voici:après une cuite,Elise se réveille et se sent très mal:"Elle était prostrée comme un crapaud,agonisant dans la faible lumière de cette maison de location."P311.

Lors d'une conversation avec son père,Rose se pose des questions sur lui:"Je me demandai s'il s'agissait d'un début de sénilité.Les sophismes de la conversation,l'attrait soudain pour les objets du passé,l'envie de tirer de l'eau au puits de sa propre existence pour s'apercevoir que personne ne veut regarder le contenu du seau.p47. 

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