LIVRE
Citons Tolstoï qui commence son roman "Anna Karenine" par cette phrase:"Les familles heureuses se ressemblent toutes.Les familles malheureuses sont malheureuses chacune à leur façon."
Dans ce roman autobiographique de 700 pages, paru en 2010,l'écrivain raconte son histoire,l'histoire de sa famille,malheureuse "à sa façon". Les composants de ce malheur familial sont des parents infantiles,un père indigent,incapable de subvenir aux besoins de sa famille,complètement dominé et souvent humilié par une femme hystérique,immature,limite folle qui fait peur à ses enfants (ils seront 10),en tout cas au petit garçon de 10 ans,William sur lequel s'apitoie l'écrivain lui-même.
Cette famille déjantée vit d'incroyables péripéties:incessants déménagements,menaces d'huissiers suite au défaut de paiement,recherche de protecteurs qui pourraient l'aider à sortir de la mouise...Certaines scènes sont déchirantes,d'autres tragi-comiques et on se demande comment un enfant peut se construire dans un tel chaos.Forcément,c'est difficile.Les enfants,par moments,font semblant d'aller à l'école,à l'insu de leur mère et passent la journée dans l'auto du père ou sur un banc.Le père veut "protéger" sa femme et lui ment sans arrêt,cachant les dettes,les menaces avec les 2 aînés comme complices.C'est lourd à porter,c'est destructeur.Cette enfance ressemble à un champ de bataille,totalement éclaté en morceaux impossibles à recoller et l'écrivain qui a été envoyé comme reporter sur des terrains de guerre,en ex-Yougoslavie par exemple,ne peut s'empêcher d'assimiler les maisons dévastées,les terres détruites à des lieux de son enfance.
C'est toute la vie de cet homme depuis l'enfance jusqu'à l'âge adulte,son mariage,ses débuts dans le journalisme,son désir de devenir écrivain... De l'écriture viendra le salut:se raconter,démêler les fils tordus de cette non-éducation,se libérer enfin de la haine,mais surtout de la peur que lui inspirait sa mère.Écriture libératoire comme s'il n'était plus en apnée,sous l'eau.
L'écrivain est de ma génération et j'ai parfois pu m'identifier à des pans de son vécu ou certaines anecdotes.Né fin 1949,l'écrivain a connu les soubresauts des années 60/70:la guerre d'Algérie(p274),l'influence de ses profs de philo(p480),les périples hasardeux en moto(p324/376), les trajets en vélo pour rejoindre l'Espagne et le Haut-Atlas(p403).Il est fan de ces 2 moyens de déplacement.L'épisode de l'avortement de sa femme Agnès(p442) où il est absent est aussi emblématique de cette époque.Enfin,lors d'un camping sauvage sous tente,ils se font rudement chasser par un propriétaire menaçant(p438).
Je veux terminer ma critique en remerciant Karine Viard qui évoquait ce livre de Lionel Duroy à la fin d'une inerview.J'avais lu avec plaisir "Eugenia" et elle m'a incitée à lire cette auto-biographie.Voici le lien de la vidéo:
https://www.facebook.com/watch/?extid=CL-UNK-UNK-UNK-AN_GK0T-GK1C&v=3542436879154419
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