lundi 13 avril 2020

LE GHETTO INTÉRIEUR de Santiago H. Amigorena

LIVRE

Vicente d'origine polonaise a émigré dans les années 20 en Argentine à Buenos Aires,laissant derrière lui sa mère et sa famille. 
Il s'est installé,a ouvert un négoce de meubles,s'est marié avec Rosita,est devenu père de 3 enfants.Vie familiale et amicale se complètent fort bien. 
Mais l'année 1940 se profile avec ses nouvelles inquiétantes venues d'Europe...plus particulièrement de la Pologne et Varsovie. 
Les lettres qu'il reçoit de sa mère sont autant d'appels à l'aide,de signaux de détresse. 
Le manque d'argent,l'enfermement progressif,la faim...autant d'épreuves qui laissent Vicente démuni d'abord,ensuite abattu,impuissant et de plus en plus culpabilisé. 
Il s'en veut,ne parvient plus à vraiment communiquer avec les siens,avec sa femme. 
Il s'entoure d'un silence quasi total,sorte de fantôme à la maison,où gestes quotidiens, affectueux lui deviennent impossibles. 
Comme emmuré au milieu des siens qui assistent désœuvrés à cette transformation.
Seule la compagnie de ses copains,quelques heures par jour,par nuit!!!...le maintient...avec eux,c'est le poker,la passion de ce jeu où il perd de plus en plus souvent. 

Cette histoire d'un enfermement progressif nous est racontée avec énormément de sensibilité,de délicatesse.Une écriture sobre qui convient au propos. 
Ce qui m'a le plus intéressé,c'est le point de vue sur la judaïté
Quand il quitte la Pologne,Vicente se sent polonais.
Ensuite au fur et à mesure des années,il se sent argentin.
Le fait d'être juif ne l'a jamais vraiment concerné,sauf quand l'Histoire avec un grand H et ses conséquences dramatiques pour les siens et son peuple vont le réveiller,lui révéler son identité première: être juif. 
Quelques citations sur ce thème:
 « Comme tous les juifs, Vicente avait pensé qu'il était beaucoup de choses jusqu'à ce que les nazis lui démontrent que ce qui le définissait était une seule chose : être juif. » 
Un peu plus loin ..
« En 1941, être juif était devenu une définition de soi qui excluait toutes les autres, une identité unique : celle qui déterminait des millions d'êtres humains - et qui devait, également, les terminer."
Terrible!!!


Par contre,l'inévitable va et vient entre les deux univers est à la longue pesant. 
L'écrivain ne peut qu'alterner ,d'un côté la lente descente aux enfers de Vicente et de l'autre,les dramatiques nouvelles d'Europe qui transparaissent dans les lettres de sa mère.
Et c'est lassant,par trop systématique. 
En tout cas,de mon point de vue.