La Passion de Dodin Bouffant/THE TASTE OF THINGS de Trần Anh Hùng

FILM

Le cinéaste vietnamien,auteur de l'inoubliable "L'Odeur de la papaye verte" en 1993,est revenu à Cannes en 2023,20 ans après avec ce film qui a obtenu Le Prix de la Mise en Scène.La cuisine,l'art culinaire,le plaisir des yeux sont donc au "menu" de ses films.

Visuellement,le film est très réussi:la beauté des plats,les gestes techniques de l'art culinaire,le soin apporté aux détails de la présentation,la palette des couleurs des sauces,légumes,viandes,desserts....C'est un vrai ballet en cuisine.Et on a l'impression de sentir les arômes,les effluves...C'est presque mieux qu'une émission TOP CHEF en direct.C'est un film esthétisant,très sophistiqué dont la longueur (2h15) peut poser problème.

Également,le jeu des acteurs principaux,Benoit Magimel et Juliette Binoche (qui ont un temps vécu ensemble).Ils interprètent Dodin Buffant,surnommé le "Napoléon de la Gastronomie",propriétaire du château où sa servante oeuvre en cuisine de façon spectaculaire.Un lien les unit qui dépasse le contexte de la cuisine.

Il y a quelque chose qui sonne faux,qui m'a dérangée dans leur jeu,quelque chose d'emprunté,d'affecté dans les dialogues d'une grande lenteur,pas vraiment pertinente.Ils sont longs,interminables,comme filmés avec la caméra au ralenti.C'est dommage,car le plaisir visuel du spectateur s'en trouve diminué.En tout cas pour moi.

 

 

REPRISE/ou Nouvelle Donne,2008 de Joachim Trier

FILM

Je viens de découvrir le premier volet de la trilogie de ce cinéaste norvégien.Il est sorti en 2008,avant Oslo,31 août et Julie en 12 chapitres.Il y a clairement des thématiques,une source d'inspiration communes à cette trilogie.Et surtout un acteur fascinant,qui tient la vedette dans les 3 films:Anders Danielsen Lie***

Dans ce premier long métrage,il est question de littérature,d'amitié ...et de rivalité.Deux amis écrivains,Philipp et Erik ne rencontrent pas le même succès éditorial et paradoxalement Philippe qui réussit va connaître de lourds problèmes psychologiques.Son visage souvent filmé en gros-plan exprime le doute,une insondable tristesse,voire du désespoir...un air perpétuellement perdu. Ce film transpire le mal-être,la difficulté d'exister.

Les affres de la relation amoureuse,la difficulté de rompre seront reprises surtout dans les aventures de Julie (3ème film).Les personnages sont plongés dans une difficulté existentielle,celle des choix déterminants,du sens de la vie...Ce premier film est très axé sur L'AMITIÉ,sur les copains,occasion de vivre des soirées bien arrosées,mais aussi des moments de détente au bord de la mer... assortis de discussions,de questions...L'avis des amis,leurs conseils,leurs réactions semblent des valeurs sûres.

 

                                          

 

UN ÉTÉ PRODIGUE de Barbara Kingsolver

 LIVRE

Barbara Kingsolver est une écrivaine américaine,née dans le Maryland.Elle a passé une partie de son enfance au Congo avec un père pasteur,ce qui inspira un merveilleux roman:"Les yeux dans les arbres" (lien de ma critique plus bas).

Cette fois,elle suit le destin de 3 jeunes femmes dans les Appalaches qui doivent,chacune à leur manière, s'imposer,s'affirmer,créer aussi les conditions pas toujours simples de leurs existences.On retrouve dans ce 4ème roman l'importance de la NATURE,des plantes (le fameux chèvrefeuille,invasif en Amérique du Nord),des animaux (les coyotes),des oiseaux,aussi des papillons de nuit ( un des 3 titres).Le thème de l'écologie,du respect de la nature traverse toute son oeuvre,c'est son moteur.En même temps,elle sait camper des personnages attachants,contrastés qui vivent des situations de blocage,de doutes,de choix difficiles qui nous les rendent si proches.

Un extrait qui évoque la personne de Deanna:

"Elle tira les couvertures sur sa tête, ne laissant qu'un petite fenêtre à travers laquelle elle pourrait observer ses mains précises, sûres, en train de charger du petit bois dans le poêle. Elle pensait à ce que faisaient les gens avec leurs mains, si précieuses: allumer des feux qui s'éteignaient, scier des arbres pour construire des maisons qui pourriraient et s'effondreraient avec le temps. Tout cela était il comparable avec la grâce d'un papillon de nuit sur une feuille, pondant d'impeccables rangées de minuscules œufs vitreux? Ou à une moucherolle tissant un nid de mousse dans lequel elle couverait sa nichée" 

Et le lien vers "Les yeux dans les arbres":

https://parlonscinebouquins.blogspot.com/2014/06/les-yeux-dans-les-arbres-de-barbara.html

La salle des profs/"Das Lehrerzimmer" de İlker Çatak

FILM

La SOLITUDE du jeune prof.

Sorte de "chevalier blanc" qui se bat pour ses valeurs,quitte à affronter l'hostilité de ses collègues,de ses élèves ...même des parents,car suite à des suspicions de vol dans l'école et  la classe,Carla,alias madame Nowak va être confrontée à de nombreuses rumeurs,accusations...Elle se retrouve bien seule,car quasi tous la lâchent,la critiquent.

Le scénario,très fort,très bien construit permet d'éviter la moralisation,la démonstration.L'intrigue est pleine de surprises,de rebondissements qui maintiennent un vrai suspens.Remarquable performance de l'actrice,Leonie Benesch qui porte bien sûr le film,même si elle ne se dépare jamais de cet air sévère,concentré,tracassé aussi... aucun sourire !!!

PROF...ou EX-PROF... ,on peut se reconnaître dans certaines situations:défense d'un élève envers et contre tous en conseil de classe,...solidarité d'une collègue,...affrontement tendu avec un élève qui tourne au bras de fer,désaccords avec la direction,choix délicat entre un élève problématique ou le reste de la classe...Ce film sent le vécu,le VRAI,le réel,celui de la vie scolaire qui nous est ici dépeinte sans ménagement,avec une entière authenticité.Ce film allemand a concouru aux côtés de "The zone of interest" pour l'Oscar du meilleur film étranger.

Critique positive de Hugues Dayez:

https://www.rtbf.be/article/les-critiques-dhugues-dayez-la-salle-des-profs-le-poids-de-la-suspicion-11339847

                                  

 

OSLO,31 AOÛt de Joachim Trier

 FILM

France 4 a récemment programmé ce film de 2011. Bien avant "JULIE en 12 CHAPITRES" qui avait été remarqué au Festival de Cannes 2021. 

Très touchée par ce film poignant, d'une grande intensité. On suit une journée, celle d'un jeune ex-toxicomane qui vit sa première sortie après une cure de 6 mois. Plusieurs rencontres, retrouvailles jalonnent la journée...notamment avec un ami proche, séquence de dialogues très vraies entre eux qui se poursuivent dans des lieux différents. Un autre moment,celui où le jeune homme,Anders,seul à une table,écoute diverses conversations autour de lui qui l'ébranlent.... Sans dévoiler la fin de cette journée-test,disons que le film est traversé d'un constant malaise.Le visage du jeune homme, (acteur impressionnant*** Anders Danielsen Lie,que J.Trier reprendra dans JULIE...) n'exprime que tension,doutes et tourments Son mal-être est palpable.On le sent totalement perdu dans cette ville qu'il connaît si bien...et reconnaît, mais où il erre tel un fantôme.... L'unité de LIEU et de TEMPS est la marque du film qui sonne tellement juste, tellement vrai. 

JE CONSEILLE VIVEMENT.

  Voici le visage du jeune homme:

                                    

LE CIEL ROUGE ou AFIRE de Christian Petzold

FILM
                                                                                                                                                                            L'action se passe l'été dans une maison au bord de la Baltique où 2 jeunes gens amis prennent leur quartier.L'un écrit, l'autre prépare un portfolio de photos.Légère tension entre eux dès le début, de plus des incendies sont signalés au loin sur la côte.                            Après une première heure d'une extrême lenteur ... l'histoire décolle, le sujet se resserre, se recentre sur le personnage principal, Leon qui flotte,doute, se transforme en une sorte de "statue de sel", envahi par l'amour.

Extraordinaire prestation de ce jeune acteur allemand.

Tout est dans les regards...tout est suggéré.

Ambiance de plus en plus intense...

Film intimiste.

Le final du film, les dernières scènes sont particulièrement réussies, originales.

Assez rare dans les films.

Le réalisateur Christian Petzold ne cache pas son admiration pour Rohmer qui clairement l'inspire.

FERRARI de Michael Mann

 FILM

J'ai été voir ce film pour deux raisons.J'admire énormément le réalisateur de HEAT,notamment ... et j'ai eu l'occasion, lors d'un voyage en Émilie-Romagne en 2014, de visiter le musée Ferrari à Modène.

Ce BIOPIC consacré à Enzo Ferrari,le célèbre concepteur automobile se centre sur une année bien précise:1957.Année de tous les drames,puisque le couple Ferrari se déchire et un coureur de l'écurie meurt au cours de la célèbre course Mille miglia (les 1000 MILES) tuant dans l'accident une dizaine de spectateurs postés le long du parcours.La célèbre course sera annulée pour toujours. 

Que dire?sinon que le film est traversé de part en part par le chagrin.Déjà,le couple Ferrari a perdu un fils en bas âge et à présent le sort s'acharne.La faillite guette et la débâcle du couple se précise.Assez bon choix des acteurs pour le couple,Adam Driver et Penélope Cruz,mais l'un ne quitte jamais un air préoccupé,son comportement rigide avec les autres,épouse ou employés reste "monolithique" et l'autre est cantonnée à une épouse acariâtre,désagréable,revancharde...

Cette sensation de tristesse infinie culmine lors d'une magnifique séquence à l'opéra où chacun replonge dans ses souvenirs.La course automobile fatale est,elle aussi, filmée avec brio:gros plans sur les visages des pilotes,vrombissements effrénés des bolides,villes traversées reconnaissables,comme Bologne et Mantoue... C'est assez réussi.

Mais in fine,... quelle est L'INTENTION du cinéaste en tournant ce film? Quel est son point de vue,son "angle d'attaque"?Je n'ai pas la réponse.Est-il intéressé par la compétition, la rivalité finement évoquée entre les écuries,Maserati,Jaguar (venu spécialement d'Écosse),Fiat ...et Ferrari ...OU a-t-il voulu montrer le drame conjugal et ses tensions? Sans doute,un peu les deux.

Photo prise à Modène en 2014 au Musée FERRARI:

                                       

 

L'EMPREINTE de Alexandria Marzano-Lesnevich

LIVRE

L'écrivaine américaine,passionnée de Droit et opposante à la peine de mort,s'est intéressée à l'histoire d'un jeune homme condamné à mort pour avoir tué un jeune garçon.Elle se rend en Louisiane où se tient le procès,elle consulte les dossiers,les interrogatoires,les aveux et remonte l'histoire de celui qui se sachant pédophile,avait demandé de l'aide (p164) sans l'obtenir.Elle découvre les antécédents familiaux de Ricky Langley,la mort d'un frère aîné Oscar dans un accident d'auto qui a handicapé sa mère.Celle-ci a vécu les 9 mois de grossesse de Ricky dans un corset de plâtre et est restée impotente... Lourd destin pour l'accusé.Pendant ses recherches,des souvenirs de sa propre histoire la traversent,la percutent...Elle nous les partage par petites vagues:les abus de son grand-père,la mort d'une soeur Jacqueline à la naissance...et surtout cet art du non-dit,du secret que pratiquent ses propres parents.Tout est soigneusement cadenassé.Courageusement,elle posera les questions qui dérangent à sa mère,elle consultera les albums de photos familiaux...elle ira même parler à son grand-père et surtout elle écrira tout ça.L'écriture la libérera peu à peu de ce carcan étouffant.Une phrase à la fin du livre,p427:

"Je veux que ces mots soient les derniers que je leur adresse.Que là où était le SILENCE,soit la parole.Que là où étaient les SECRETS,'j'ouvre la voie à la complexité de la vérité."

Elle ira aussi rencontrer Ricky en prison,ne se dérobant à aucun rendez-vous de son destin.

LA ZONE D'INTÉRÊT de Jonathan GLAZER

 FILM

LA ZONE D'INTÉRÊT de Jonathan Glazer.
Grand Prix du JURY 🏆 au Festival de Cannes.
Film glaçant, saisissant, ...dérangeant aussi.
Le MAL 😱 est hors-champ.
On entend juste des cris étouffés, des aboiements de chiens de l'autre coté du mur...et il y a ce chien noir qui suit partout l'épouse de Rudolph Hoess, au jardin, à la cuisine...
Un plan récurrent m'a frappée:les passages incessants dans le corridor de la maison qui est comme un goulot, un "couloir de la mort"...et puis cette fin stupéfiante avec lieux d'aujourd'hui.
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Intéressant de lire les propos du réalisateur à Cannes:

"Ce que le film essaie de faire, c'est de parler de la capacité, de notre capacité à chacun à être violent, d'où que vous veniez", a expliqué le cinéaste en conférence de presse. "
Et essayer de montrer ces gens comme des personnes et non comme des monstres était une chose très importante.
Car le grand crime et la grande tragédie, c'est que des êtres humains aient fait cela à d'autres êtres humains".
"C'est très pratique pour nous d'essayer de nous éloigner d'eux autant que possible", a ajouté Jonathan Glazer, mettant en garde son auditoire.
"Nous pensons évidemment que nous ne pourrions jamais nous comporter de cette manière, et nous ne nous comportons pas de cette manière.
Mais je pense que nous devrions en être moins sûrs."
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Je recommande aussi la lecture de la préface de 1972  de Robert Merle de LA MORT EST MON MÉTIER ( Histoire de Rudolph Hoess) dont voici un extrait:

"Il y a bien des façons de tourner le dos à la vérité. On peut se réfugier dans le racisme et dire : les hommes qui ont fait cela étaient des Allemands. On peut aussi en appeler à la métaphysique et s’écrier avec horreur, comme un prêtre que j’ai connu : « Mais c’est le démon ! Mais c’est le Mal !... ».
Je préfère penser, quant à moi, que tout devient possible dans une société dont les actes ne sont plus contrôlés par l’opinion populaire. Dès lors, le meurtre peut bien lui apparaitre comme la solution la plus rapide à ses problèmes.
Ce qui est affreux et nous donne de l’espèce humaine une opinion désolée, c’est que, pour mener à bien ses desseins, une société de ce type trouve invariablement les instruments zélés de ses crimes.
C’est un de ces hommes que j’ai voulu décrire dans La Mort est mon Métier. Qu’on ne s’y trompe pas : Rudolf Lang n’était pas un sadique.
Le sadisme a fleuri dans les camps de la mort, mais à l’échelon subalterne. Plus haut, il fallait un équipement psychique très différent.
Il y eut sous le nazisme des centaines, des milliers de Rudolf Lang, moraux à l’intérieur de l’immoralité, consciencieux sans conscience, petits cadres que leur sérieux et leurs « mérites » portaient aux plus hauts emplois. Tout ce que Rudolf fit, il le fit non par méchanceté, mais au nom de l’impératif catégorique, par fidélité au chef, par soumission à l’ordre, par respect pour l’Etat.
Bref, en homme de devoir : et c’est en cela justement qu’il est  MONSTRUEUX."

THRILLERS de Camilla GREBE

 

Dans la catégorie "POLARS SUÉDOIS"***, je viens de lire plusieurs romans de Camilla GREBE.

C'est bien construit, haletant avec de vraies surprises et l’auteure suédoise se montre sensible à l'humain, aux liens familiaux...

Je recommande.

J'ai commencé par le dernier:"L'énigme de la Stuga",de 2023,c'est un drame familial.

Coup de cœur pour "Le journal de ma disparition" de 2019 :histoire originale sur fond d'Alzeimer...

LES YEUX DE MONA de Thomas Schlesser

 

LIVRE

Gros coup de cœur.

Livre passionnant sur une cinquantaine d'œuvres d'art, connues ou moins connues.

C'est présenté sous forme de dialogues entre un grand-père et sa petite fille.

Celui-ci l'emmène découvrir quelques trésors de musées célèbres, tels le Louvre, Orsay, Beaubourg...

52 tableaux correspondant aux 52 semaines nous sont ainsi expliqués de façon à la fois didactique et joyeuse.

Ça m'a fait penser au best-seller de vulgarisation philosophique d'un écrivain norvégien, paru en 1995: LE MONDE DE SOPHIE.

L'idée étant de s'instruire de façon ludique, divertissante.

Et c'est une réussite

Je le recommande.

Thomas Schlesser,historien de l'art, a récemment expliqué à la Grande Librairie, la genèse de ce livre.

Voici le lien:

https://youtu.be/AS5Jfx28WwI?si=sAJXYZjojGshRuCx

PERFECT DAYS de Wim Wenders

 FILM

Ce film est un hymne au bonheur,... au simple bonheur d'exister,car Hirayama,le personnage principal savoure chaque instant comme une pépite.Les petites joies du quotidien:se réveiller,regarder le ciel,les arbres,partir au travail,regarder encore,photographier les arbres...etc.Vie ritualisée à l'extrême dont chaque moment est vécu en pleine conscience.Remarquable soin que le quinquagénaire apporte à un travail banal.Chaque geste accompli est à la hauteur du standing des toilettes publiques de Tokyo.Rien d'extraordinaire donc dans cette histoire,si ce n'est la visite d'une nièce et l'échange avec un homme atteint de cancer.Mais quelle fraîcheur,quel rayon de soleil,ce film qui nous offre une traversée des rues de Tokyo en auto ou à vélo ...et des vues "carte postale" dont celle de la Tour de Radiodiffusion SKYFREE,inaugurée en 2012.La dernière scène est juste bouleversante sur l'air "Feeling Good" de Nina Simone,bouleversante dans les expressions du visage de cet homme.L'acteur, Kōji Yakusho a été récompensé à Cannes du Prix d'interprétation masculine

 

Voici le lien d'une interview de WIM WENDERS à SensCritique :

https://www.facebook.com/senscritique/videos/334302106175279/

Le cercle des neiges de Juan Antonio Bayona

 FILM:meilleur film à la Cérémonie des GOYAS,ce 10 février.

J'avais lu en 2006 le témoignage de Nando Parrado,un des 17 survivants du crash de l'avion uruguayen dans les Andes en octobre 1972."Miracle dans les Andes"raconte l'accident,leur survie dans une nature glacée et hostile... et aussi l'après.Comment lui, s'est reconstruit,a peu à peu partagé cette terrible expérience dans des conférences.Ce partage a donné du sens à ce qu'il avait vécu avec ses compagnons d'infortune.

Le film proposé cette année reprend lui aussi les moments forts de ce drame:après l'accident,les conditions de survie,la lutte contre le froid intense et la faim...les terribles choix,dont celui de se nourrir de la chair de ceux qui étaient décédés pour tenir...les instants d'espoir et de désespoir... la mort de certains,blessés ou trop faibles pour survivre...La décision pour deux d'entre eux,Nando et Roberto d'entreprendre une marche vers les vallées du Chili qui va se conclure par leur sauvetage.

Ce qui frappe dans ce film,c'est sa grande sobriété.Aucune image,aucune scène ne vise le sensationnel.On reste au plus près de ces survivants,réunis par des liens si forts,car c'est bien la solidarité,une immense solidarité qui a assuré leur salut.Une leçon d'humanité donc,très loin du film catastrophe-type.

Voici ce livre de Nando Parrado:

                           

Sur les chemins noirs de Denis Imbert

 FILM

 Le cinéaste français a entrepris la réalisation d'un film inspiré du récit de Sylvain Tesson où il évoque sa traversée de la France après une chute d'un toit qui a failli lui coûter la vie.Courage,acharnement,détermination animent ce marcheur physiquement atteint mais dont le moral est celui d'un battant.C'est ça ou mourir.

Le film est assez fidèle au livre,avec l'ajout d'un personnage.On marche avec l'acteur Jean Dujardin,on contemple des paysages splendides, on s'arrête pour consulter la carte,on dort à la belle étoile... Est-ce vraiment un plus par rapport au livre?Pas sûr.J'ai trouvé ce film assez artificiel,superficiel et la beauté des paysages ne suffit pas à donner un souffle,une âme au récit.Dujardin reste très sec dans ses rencontres et ne se dépare pas du même air préoccupé tout du long.C'était une gageure de transposer en images fortes des mots précis,des réflexions existentielles qui collaient si bien à cette reconstruction physique et mentale.Pas évident.

LA FOUDRE de Pierric Bailly

LIVRE

Julien,berger dans le Jura découvre qu'un ancien camarade de classe,Alexandre est accusé de meurtre et incarcéré.Il aurait assommé un jeune chasseur menaçant,sans intention de le tuer.Assez vite,Julien entre en contact avec Nadia,son épouse qui trouve en lui une écoute,un soutien.Progressivement,Julien s'éprend d'elle.Cela donne quelques belles pages d'introspection,d'auto-analyse.Julien décortique ses sentiments,évalue comment il peut résister à l'attirance...ou pas,conscient du caractère exceptionnel de cette rencontre comme une chance à saisir.De belles pages (p 300 à 317) sur la montée de la passion,ainsi que sur sa présence au procès,l'occasion pour lui de revoir Alexandre et de se rappeler leur lien au Collège.Le narrateur décrit l’ambiguïté de cette relation à sens unique,lui admirant beaucoup Alexandre,plus grand,plus charismatique que lui et la jalousie teintée d'admiration que cela suscitait,leur rivalité amoureuse aussi.C'est très réussi,ce va-et-vient entres les phases du procès et la réminiscence de souvenirs anciens:des discussions,des relations féminines,des voyages à Barcelone...et le fameux rire d'Alexandre. 

Il y a quelque chose de vrai,d'authentique,de très sincère dans ce récit,porté par une langue simple et accessible.Très belle maîtrise de la langue qu'on avait déjà appréciée dans son roman précédent:"Le roman de Jim" *** qui évoquait la paternité.Par contre,les 100 premières pages de ce récit  s'attardant sur le métier de berger,l'école,les premières partenaires me semblent trop diluées,pleines de détails qui n'apportent pas grand chose à l'histoire.Elles ont fortement ralenti mon intérêt pour la suite.

 Voici le lien vers ma critique du "Roman de Jim":

https://parlonscinebouquins.blogspot.com/2022/05/leroman-de-jim-de-pierric-bailly.html

 

BURNING DAYS de Emin Alper

FILM 

Dès le début du film,on est mal à l'aise et puis,ça se tend de plus en plus jusqu'à l'incroyable scène finale.L'intrigue se passe dans un village reculé d'Anatolie qui connaît des problèmes d'approvisionnement en eau et d'assèchement des terres où se créent  soudainement d'inquiétants cratères,des gouffres...Un jeune procureur est appelé pour enquêter,trouver les responsables d'une telle situation.Ce jeune homme inexpérimenté et assez rigide se heurte à une juge trouble,un maire corrompu ,un journaliste ambigu et surtout des villageois endoctrinés.Peut-il se sortir des pièges tendus,de l'animosité qu'il suscite et imposer la Loi?Mission délicate,voire impossible.

La thématique du "chevalier blanc" qui à la corruption politico-économique oppose le Droit,les valeurs démocratiques est fréquente au cinéma.Notamment dans ce polar égyptien de 2017:"Le Caire Confidentiel" ( photo***) où un policier traque l'argent sale.

Le film turc faisait partie de la section,Un Certain Regard du festival de Cannes en 2022.Accueil favorable du public qui a reconnu dans ce film,des combats relativement universels.L'intérêt du film tient à différentes scènes très réalistes où les protagonistes s'affrontent.Une soirée arrosée où le procureur a été invité..et drogué... Derrière les sourires mielleux,se cache une vraie détermination à nuire et salir le procureur.Il faut accepter une certaine lenteur,un rythme peu soutenu qui étire inutilement et aussi l'accumulation de flash-back de la fameuse soirée...

 ***Polar égyptien de 2017 du réalisateur Tarik Saleh qui récemment, en 2022, a confirmé son talent de cinéaste avec "La Conspiration du Caire"/Boy from freedom:Prix du Scénario  à Cannes.

                                  

BERGMAN ISLAND de Mia Hansen-Løve

 FILM

Un couple de cinéastes désireux de marcher sur les traces du GRAND BERGMAN s'installe sur l'île de Faro,lieu de vie et de création artistique du maître suédois.Les lieux-culte,la maison de Bergman,les endroits de tournage,la plage,sa bibliothèque personnelle,même le cimetière où il repose.... ne manquent pas,ils peuvent être visités dans un bus "Safari-Bergman"...Incroyable.Bref ils sont venus chercher l'inspiration et on les voit écrire,échanger impressions et conseils,rouler à vélo,marcher sur la mythique plage...etc

Malgré la beauté des paysages filmés en gros plans,le film ne parvient pas à susciter notre intérêt (ni celui du Jury du Festival de Cannes en 2021...),on sort rarement de la banalité des propos échangés et même si à un moment,se produit une mise en abyme:récit du scénario imaginé par la jeune femme,ça ne sauve pas l'entreprise .... l'histoire reste très convenue,manquant totalement d'originalité,de peps...

En résumé,ce film visuellement intéressant, à même de booster le tourisme sur cette belle île, est d'une grande vacuité.Tim Roth,acteur formidable est cette fois terne,inexpressif et sa partenaire que l'on perçoit vivre une mini-crise existentielle, quitte rarement un air renfrogné et préoccupé....Bonjour l'été sur l’ile de Faro,hantée par Bergman.

L'ENLÈVEMENT/RAPITO de Marco Bellochio

 

FILM

Inspiré d'un fait historique peu connu,le film du cinéaste italien faisait partie de la sélection officielle du festival de Cannes 2023.Il n'a pas suscité l'intérêt du Jury.Pourtant le film présente de nombreuses qualités.L'histoire dramatique qui nous est montrée est extrêmement bien construite,les musiques bien adaptées aux différentes situations et le choix des acteurs,notamment pour l'enfant enlevé est pertinent.Le récit de l'enlèvement d'un enfant juif à sa famille par les soldats du pape au 19ème siècle constitue une sorte d'opéra tragique avec des moments bouleversants qui se clôt sur un final digne d'une tragédie grecque.J'ai vraiment été prise par ce film.

Voici un lien vers L'affaire Mortara:

 https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Mortara

Et l'avis unanimement élogieux du Masque et la Plume:

 https://www.radiofrance.fr/franceinter/critique-l-enlevement-ou-le-requiem-magnifique-et-bouleversant-de-marco-bellochio-1853374

 

ANATOMIE D'UNE CHUTE de Justine Triet

 FILM

Palme d'Or au dernier festival de Cannes,le film vient d'être consacré aux Golden Globes.Il a su plaire au public américain,car il porte des thèmes universels,ceux du couple et de son effritement, de l'enfant pris dans la tourmente d'un couple qui se déchire ,de la justice qui apporte sa vérité,une vérité judiciaire...etc

Les prestations de tous les acteurs sont exceptionnelles,toujours le ton juste et la réalisatrice fait preuve d'une belle direction d'acteurs.L'actrice principale est bluffante,jouant toute une gamme variée de sentiments:le désarroi,la tendresse,la colère,la rouerie aussi....La scène de la dispute du couple,la veille du décès du mari est un must*** :époustouflante,avec des répliques qui sonnent tellement réelles.C'est incroyable.Le jeune garçon aussi impressionne par sa maturité,sa douceur,ses silences et sa retenue en général.

C'est un film intelligent,puissant,qui pose de grandes questions existentielles et peut ainsi toucher un large public malgré sa longueur.

FERMER LES YEUX/Cerrar los ojos de Victor Erice

 FILM

Film espagnol,très personnel,habité,intense qui donne la part belle aux émotions,à la poésie.C'est plein de subtiles correspondances,de rappels un peu comme des perles enfilées sur un collier.Le collier de la mémoire,des souvenirs...Une plongée dans le passé d'un cinéaste.

C'est aussi un thriller,un film à énigme qui s'articule autour d'une disparition,celle d'un acteur,Julio disparu soudain 22 ans auparavant lors du tournage d'un film de son ami-réalisateur,Miguel.Disparition inexpliquée qui taraude Miguel.Celui-ci accepte de participer à une émission télé sur les personnes disparues... c'est le début d'une quête/enquête..

Le film,le cinéma,la salle de cinéma sont les clés de cette recherche...des photos aussi,une pièce du jeu d'échecs:le Roi...Le film apparaît comme libération de la mémoire et ouverture de la conscience.Le film est long certes,mais ce temps cinématographique convient au développement de ce récit dense et envoûtant.Victor Erice,cinéaste espagnol,âgé de 83 ans, n'a réalisé que quelques films et celui-ci est sorti en août.

Une photo de Miguel,le personnage central qui porte littéralement le film:

                                     

MAESTRO de Bradley Cooper

 FILM

Le réalisateur ( et acteur) Bradley Cooper sort un film,produit par Spielberg sur la vie du célèbre chef d'orchestre Léonard Bernstein et sur sa relation compliquée avec une actrice Felicia rencontrée en 1946.Projet ambitieux.Film mené à la baguette .... se voulant original, mais on sent trop la performance. Il y a un désir de bien faire, d'exceller, de montrer son talent de metteur en scène de la part de Bradley Cooper. Pourtant les 2 acteurs principaux sont très talentueux et conviennent au rôle. La maladie de Felicia est montrée avec beaucoup d'insistance, perdant ainsi en intensité émotionnelle

Bref,un film intéressant par moments mais qui ne m'a pas fortement emballée.                                                  

 

Je verrai toujours vos visages /ALL YOUR FACES de Jeanne Herry

FILM***

Film fort,puissant,poignant d'une totale justesse.Le sujet est la justice restaurative introduite en France en 2014 qui consiste à mettre en présence des victimes et des agresseurs entourés d'animateurs/animatrices garantissant la sécurité de chacun et le bon déroulement des échanges.On s'exprime, on passe le bâton de parole,on écoute un autre vécu...,on remet en question son comportement et peu à peu, des ponts se créent, permettant une inattendue compréhension... et surtout on découvre en soi, un être quelque peu transformé.

Ce film donne de l'espoir,il redonne confiance en l'être humain.Rien n'est jamais figé,déterminé.Les acteurs sont tous d'une incroyable justesse de ton,ni misérabiliste,ni donneur de leçon.Juste naturels.Gros coup de coeur pour Adèle Exarchopoulos qui confirme une fois encore son immense talent ...soutenue par Élodie Bouchez,elle aussi lumineuse de simplicité.

Une réussite,une grande réussite de l'Année 2023.