L'écrivain est suisse,mais il a passé sa petite enfance à Paris.Son grand-père était collaborateur à la police judiciaire.Cela expliquant peut-être son goût pour l'enquête.
Dans ce roman,trois destins sont tissés,tressés.Deux hommes et une femme,jeunes adultes en 1924 vont voir leur vie prendre des tournants inattendus,prometteurs. Ils joueront,chacun dans leur domaine,un petit rôle pendant la 2ème guerre mondiale. Trois disciplines:l'archéologie,le chant,la physique quantique. Félix,physicien pacifiste, participera à l'élaboration de la bombe atomique à Los Alamos. Laura,chanteuse de cabarets offrira ses services comme espionne. Emile,lui,grâce à son talent de dessinateur et sa créativité fera merveille sur les champs de fouille de Troie et de Knossos.
Le récit passe sans transition de l'un à l'autre,le style est agréable,sans artifices. Une lecture facile donc Un vrai roman d'aventures qui réserve de bonnes surprises...
L'écrivain a dû bien s'amuser à écrire cette facétie,à brocarder les grands intellectuels,philosophes,hommes politiques des années 80. Cette lecture ravira les soixante-huitards que nous sommes ( ou que nous ne sommes pas??...) en découvrant tant de noms célèbres lors de Mai 68:Althusser/BHL/Foucault/Sollers/Sartre/Derrida .....et bien sûr Roland Barthes dont il imagine la mort comme un assassinat politique!!! ....Oui,oui...
Quelle délectation, quelle bouffonnerie d'imaginer toutes ces personnalités dans des situations incongrues,d'inventer des dialogues aussi farfelus...en somme de leur prêter des paroles insensées..
Mais aussi quel sens de la narration et du suspense,car c'est un vrai hommage à Umberto Eco qui avait imaginé dans "Le nom de la rose" qu'on tuait pour un livre interdit sur le rire. Ici,on aurait tué pour s'emparer d'une formule qui serait un formidable instrument de pouvoir... Une vraie enquête est menée avec un vrai commissaire,genre Colombo qui s'attache les services d'un jeune prof en "sémiologie" et suit une improbable piste bulgare qui l'amènera aussi à Bologne.
Allez,.....si vous avez un peu oublié vos années de philo ou littérature,replongez-vous dans ces concepts qui fleurent bon nos années d'étudiants :sémiologie,linguistique,signifiant/signifié,différance avec a,le conatif,le performatif...
Un bon divertissement de cette rentrée littéraire,alors que le roman a été "oublié"? dans la liste du prix Goncourt 2015.
Un docteur spécialisé dans le "réveil" des comateux grâce à des substances olfactives qui réactivent les souvenirs et contribuent à ranimer les "endormis"... Une course poursuite effrayante entre une auto et un camion,digne de "Duel", premier film de Spielberg... Une famille sauvagement attaquée,puis mutilée,un soir de Noël... Des opéras de Mozart en fond musical... La traque d'un tueur en série,échappé d'un établissement de haute sécurité et qui s'est fait passer pour un "malheureux" auto-stoppeur bègue... Une course contre la montre pour arrêter ce fou dangereux qui s'en est ensuite pris à 2 femmes,dont Mila.... Course contre la montre qui prend la forme d'un incroyable voyage à travers les Etats-Unis, de la Californie,Arizona,Utah jusqu'au lointain Maine..
Ce sont là quelques ingrédients de ce thriller passionnant. On ne lâche pas le livre une fois commencé tant le suspense est soutenu. Il y a du Frank Thilliez dans ce thriller.Ce mélange d'angoisse,de trash,de plongée dans les noirceurs de l'âme humaine.C'est du même acabit.
Puissance poétique Humanité Délicatesse Grâce et élégance...
Tant de mots pour qualifier ce magnifique récit. ça va chercher dans les couloirs secrets de l'enfance,dans les zones d'ombre de nos vies... Des liens subtilsse tissent entre les personnages de cette histoire.Ils se "réchauffent" peu à peu au contact les uns des autres,laissant affleurer ce qui était bien enfoui en eux. Quelques gestes tendres,un visage chaleureux,le contact des mains,de jolis "haïkus",une photo qui fait sens...tout cela les aide à se reconstruire.Leur vie respective se redynamise. Chacun trouve sa place,sa juste place.
Style étincelant et je me permets de reprendre l'analyse d'Emmanuelle Caminade,publiée le 28/2/2015dans "L'or des livres": "Et la belle écriture poétique, elliptique et concise de Jeanne Benameur
vient parfaire ce travail subtil. Elle impulse son rythme particulier,
fait d'une juxtaposition de phrases courtes qui n'excluent pas pour
autant de brèves envolées, la ponctuation et les retours à la ligne
ménageant de nombreuses respirations : une écriture palpitante qui
semble avancer sur le fil du souffle. Sa langue sensuelle part de la
matière, de la perception des corps et des objets, de la nature, pour
capter des émotions, des élans, des mouvements imperceptibles, et
approcher une réalité secrète ouverte à l'infini. Une langue économe,
aux mots choisis, qui suggère ou souligne un sens caché en s'appuyant
très souvent sur la valeur symbolique des choses, des lieux et des
gestes mais aussi des prénoms, des nombres et des figures géométriques..."
La tuerie de Columbine,1999.Le 11 septembre 2001.L"après" 11 septembre et le difficile retour des vétérans d'Irak.L'ouragan Katrina,2005.... L'écrivain marqué personnellement par ces événements avoulu que son héros "fictif" soit ancré dans des faits bien "réels" eux.Nommer les vrais noms des vivants et des victimes de la tuerie est à ses yeux une manière de leur rendre hommage. Le héros du récit,le narrateur est un être profondément humain,tout à la fois fragile et excessif,blessé par les diverses épreuves de la vie.Il est à l'image de cette Amérique complexe,imparfaite,tantôt héroïque,tantôt minable.... Lui qui anime des ateliers d'écriture revisite et interroge d'anciens mythes comme celui du labyrinthe et son Minotaure.Le sujet de fin d'année proposé aux élèves étant l'énigmatique tableau de Picasso,peint en 1935,intitulé "Minotauromachie"
L'écrivain a mis 10 ans pour écrire ce roman.Il s'en explique très bien dans la postface et le dédie à sa "maman" dans une dédicace fort émouvante où il évoque le frigo toujours bien rempli,prêt à nourrir,si nécessaire, une grande famille italienne.
Une lecture foisonnante,riche en réflexions,en questionnements et en situations variées qui élargit l'horizon culturel du lecteur européen.
Le début du récit est prometteur. Ambiance austère d'une maison d'Amsterdam au 17ème siècle,mystère d'un mariage non consommé,mari absent ou fuyant,hostilité entre les femmes ... La narration progresse avec son lot de surprises,coups de théâtre... notamment,l'étrange cadeau du mari à son épouse:sa maison en miniature... ( Maison miniature de Petronella Oortman,exposée au Rijksmuseum d'Amsterdam)
Ensuite,viennent les étranges livraisons de poupées/figurines,plus vraies que nature,car elles représentent à s'y méprendre les habitants réels de la maison... Puis,ce sont des complots,des secrets,des mots chuchotés,des silhouettes entr'aperçues,une femme aux cheveux blonds... Serait-elle la miniaturiste,la créatrice de cette oeuvre d'art?a-t-elle écrit ces phrases sibyllines qui accompagnent les livraisons?
Questions restées sans réponses,alors qu'elles sont le moteur du récit. D'où sentiment de frustration,impression d'avoir été légèrement mené en bateau.... Le lecteur reste sur sa fin,sans compter une scène assez incompréhensible dans la logique du récit:celle où "l'amant" du mari trucide la chienne bien-aimée de celui-ci et manque de faire subir le même sort au serviteur noir.Pourquoi?Pourquoi un tel acte?Quel mobile?MYSTÈRE. En plus, cette scène est mal écrite.
Il n'empêche.Ce récit captive par son intrigue complexe,par la beauté de l'écriture,par son héroïne attachante,par la restitution d'une ambiance passée avec ses coutumes commerciales,religieuses,alimentaires... Ce léger brin de sociologie n'est pas pour déplaire.
Voici quelques passages du roman,témoins de ce beau style:
"Il semble que la maison soit encore éveillée,malgré l'heure terriblement tardive.Elle entend qu'on ouvre et referme la porte d'entrée,puis qu'on ouvre une autre porte,à l'étage...Suivent des chuchotements,deux voix,des pas dans le couloir avant qu'un silence intense n'enveloppe toute la maison. Elle tend l'oreille,esseulée.Un filet de rayon lunaire vient éclairer le lièvre et la grenade pourrie sur un tableau.C'est un calme trompeur.On dirait que la maison respire. Elle n'ose pas quitter à nouveau son lit,pas en cette première nuit." p43.
"C'est lors du trajet en barge jusqu'à la guilde des argentiers que les nouveaux époux sont seuls pour la première fois... Nella inhale l'air du bateau,les indices des lieux où il est allé,l'arôme de cannelle dans chacun de ses pores.Elle retrouve une trace de la forte odeur musquée qu'elle a sentie,le premier soir à la porte du bureau.Le visage tanné de son mari,ses cheveux trop longs,décolorés,raidis par le soleil et le vent,déclenchent en elle une pulsion embarrassante... le désir de savoir ce qu'elle éprouvera quand ils s'allongeront enfin ensemble.... peut-être viendra-t-il ce soir,après la fête?..." p110.
"Le silence tombe entre eux et ils enlacent leurs mains,comme si le contact de la chair pouvait retarder l'arrivée de l'aube." p474.
LIVRE Premier roman de cette auteure belge,Geneviève DAMAS. Elle a obtenu le prix des Lycéens 2013 pour cette oeuvre.
C'est joli,.. joliment écrit.Ça se lit agréablement au cours d'une belle après-midi d'été. C'est plein de profondeur,de beaux sentiments,ça parle au coeur.
Pour ceux qui ont déjà humé l'air de la campagne,qui savent combien les cochons sont des animaux attachants... et très propres (contrairement à leur fausse réputation),ceux qui n'ignorent pas l'ambiance d'un village,de sa faune typique: ces habitants souvent hauts en couleur et aussi variés et dissemblables que possible. Personnages parfois taciturnes,taiseux qui gardent bien cadenassés des secrets de famille inavouables. François,le héros attachant de ce récit en fera les frais.
